Petite playlist très blues, ce matin, mais un peu à part, puisqu’il s’agit, d’une certaine manière, d’un retour aux sources… –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.
Je m’explique : Alexis Korner’s Blues Incoporated fut l’introducteur du blues en Angleterre, où il est surnommé affectueusement le « Grandfather of British blues« . Dès les années 50, il rassemblait autour de lui plusieurs musiciens de jazz pour enregistrer de très nombreuses pièces de Chicago Blues. Lui-même guitariste plutôt talentueux, il passa peu à peu à la guitare électrique, avec une grande circonspection cependant.
Au tournant des années 60, il jouait chaque semaine au Marquee Club, où ses fans s’appelaient Mick Jagger, Brian Jones, Eric Burdon ou Eric Clapton –le public traditionnel d’amateurs de jazz fut peu à peu remplacé par un public d’adolscents amateurs de « negro music », comme on disait dans l’Angleterre de l’époque-. Brian Jones, en particulier, eut l’occasion de jouer au sein de ses Blues Incorporated –sous le nom d’Elmo Lewis, il tenait la partie de « bottleneck guitar » dans le titre « Dust my bloom » d’Elmore James-. Plus tard, Alexis Korner invita, en première partie, le groupe Little Boy Blue and the Blue Boys –cliquer sur l’image d’archive pour la voir en grand-, composé, notamment, de Mick Jagger et Keith Richards –leur rencontre avec Brian Jones donna naissance aux Rolling Stones-. Au sein des Blues incorporated d’Alexis Korner, une vraie pépinière de musiciens est née : Charlie Watts et Ginger Baker à la batterie, Jack Bruce à la basse, Cyril Davies à l’harmonica… L’émergence du British Blues le dépassa rapidement, des groupes comme les Rolling Stones, les Yardbirds ou les Animals, puis les Cream, contribuant à le reléguer progressivement dans l’ombre. Pourtant, sans lui, rien ne serait arrivé…
Son meilleur continuateur, en Angleterre, fut l’autre découvreur de talents : John Mayall, qui fonda, pour sa part, les Bluesbreakers, formation largement mouvante, qui permit de populariser le talent des trois meilleurs guitaristes de blues anglais : Eric Clapton, Peter Green et Mick Taylor. Tous trois connurent ensuite des carrières plutôt chaotiques, mais au sein des Bluesbreakers, ils donnèrent, très jeunes, le meilleur d’eux-mêmes, contribuant ainsi à forger leurs légendes respectives et éclipsant quelque peu leur mentor, qui, à plus de 80 ans, poursuit sa carrière.
Enfin, le cas de Mike Bloomfield est un peu part : américain, il fut le premier guitariste blanc à percer dans le domaine du blues aux Etats-Unis et y popularisa, notamment, l’utilisation de la Gibson Les Paul. Virtuose brillant mais peu ostentatoire, une timidité maladive, une santé très précaire –insomniaque chronique, il ratait de sessions d’enregistrement en s’endormant la journée– et l’addiction à diverses substances ne lui permirent jamais d’accéder à la notoriété ultime, du fait de choix erratiques, d’une part, et de l’émergence de Jimi Hendrix d’autre part, qui le relégua au second plan, très injustement tant leurs styles n’ont rien à voir : Mike Bloomfield cherchait avant tout la beauté de la sonorité et la pureté, il exploita donc peu les possibilités offertes par le feedback et les effets variés. Cependant, Mike Bloomfield reste important et a marqué l’histoire de la musique américaine puisque c’est lui qui est responsable de l’électrification de la folk music de Bob Dylan : le guitariste l’accompagne en effet sur l’album « Highway 61 revisited » et y tient les parties de guitare électrique. Du coup, Bob Dylan est devenu intéressant –ou pas, c’est selon…-.