Dimanche à l’opéra – Fidelio, de Beethoven

C’est la rentrée et, dans le domaine lyrique, c’est une nouvelle saison qui commence ! Cette séance dominicale est consacrée à l’unique opéra de Ludwig Van Beethoven, « Fidelio », dans l’excellente version qu’en enregistra Herbert Von Karajan en décembre 1970, précédant les représentations du festival de Salzbourg en 1971. Ce disque marqua le retour lyrique du chef chez EMI. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Beethoven a composé trois versions de l’opéra entre 1805 et 1814, initialement intitulé « Léonore », avant de l’appeler définitivement « Fidelio » en 1814. L’œuvre, en deux actes, s’inspire du livret français de Jean-Nicolas Bouilly, déjà adapté par d’autres compositeurs, et qui connut un grand succès en France après la révolution, dont il exaltait les valeurs. « Fidelio » est un Singspiel, mêlant dialogues parlés et airs chantés. L’oeuvre se déroule dans une prison d’état espagnole, près de Séville, à la fin du 18è siècle.

• Acte I : Léonore, déguisée en Fidelio, travaille comme aide-geôlier pour se rapprocher de son mari Florestan, emprisonné secrètement par Don Pizzaro. Elle suscite l’amour de Marzelline, dont le père, Rocco, est le geôlier de la prison, assisté de Jaquino. Celui-ci est amoureux de Marzelline, mais elle le repousse. Rocco accepte d’aider Fidelio, mais l’accès au cachot de Florestan reste interdit. Pizzaro, le cruel gouverneur de la prison, ordonne à Rocco de creuser une tombe pour Florestan, qu’il compte assassiner avant l’arrivée du ministre Don Fernando.
• Acte II : Florestan, au bord de la mort, rêve de liberté et de justice. Léonore et Rocco descendent dans son cachot. Quand Pizzaro arrive pour tuer Florestan, Léonore se révèle, menace Pizzaro avec un pistolet, et sauve son mari. L’arrivée de Don Fernando met fin à la tyrannie de Pizzaro : Florestan est libéré, et la justice.

Le compositeur, épris des valeurs des Lumières et de la révolution française, se sentait animé de hautes considérations morales et critiquait volontiers les livrets des opéras de Mozart –trilogie de Da Ponte– pour leur légèreté et leur caractère licencieux. Rien de tout cela chez Beethoven. Fidelio exalte :
• l’amour conjugal et la fidélité. Léonore incarne la constance et le courage, prête à tout pour sauver Florestan ;
• la liberté et la justice. Florestan représente l’idéal de liberté, tandis que Don Fernando symbolise la justice restaurée. L’opéra exprime les idéaux des Lumières et du Sturm und Drang, chers à Beethoven ;
• l’opposition entre bien et mal. Léonore et Florestan s’opposent à la cruauté de Pizzaro, soulignant le combat entre humanité et tyrannie.

La composition de « Fidelio » fut pour Beethoven un labeur lent, long et douloureux, marqué par de multiples hésitations. Il a composé quatre ouvertures pour « Fidelio », dont la célèbre Ouverture « Léonore n°3 », souvent jouée en concert. La version définitive, en 1814, marque une rupture avec les versions précédentes : la structure est plus équilibrée grâce à un livret remanié, l’orchestration est plus étoffée et novatrice : la comparaison avec les versions enregistrées de « Leonore » -partition dans sa forme antérieure de 1805/1806- est révélatrice cet égard. Préfigurant l’opéra romantique allemand, « Fidelio » a finalement triomphé en 1814, d’abord à Vienne puis dans toute l’Europe.

Herbert Von Karajan dirigea « Fidelio » tout au long de sa carrière : 66 représentations, de 1932, à 24 ans, à Ulm –un critique de l’époque souligna que « […] tout le monde dans le public a été saisi par la tension fortement émotionnelle de cette représentation »– à 1978 ! Son unique enregistrement de l’oeuvre, réalisé en 1970 avec une équipe de chanteurs qu’il connaissait bien puisqu’il les avait déjà réunis pour son « Ring des Nibelungen » salzbourgeois. Les rôles principaux sont tenus par deux des chanteurs favoris de Karajan : Jon Vickers dans le rôle de Florestan et son ancienne Brünnhilde, Helga Dernesch, dans le rôle de Leonore. Parmi les autres chanteurs figurent Zoltan Kelemen –sans doute le meilleur Pizzaro de l’entière discographie-, Karl Ridderbusch, José van Dam et Helen Donath, charmante Marzelline.
A sa sortie, cette version de « Fidelio » fut unanimement saluée par la critique internationale et demeure, aujourd’hui encore, une très grande version de la discographie de l’oeuvre, malgré une prise de son très réverbérée qui offre de l’ampleur -énormes contrastes dynamiques, effets stéréophoniques parfois prononcés- mais nuit à la transparence.

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