Poupées new-yorkaises

La wishlist entraperçue ici m’a conduit, hier, à réécouter les New York Dolls, groupe légendaire et prémonitoire, qui ne perça pas complètement de son vivant, malgré deux albums de qualité, mais fut unanimement revendiqué par tous les groupes punks de la planète comme source d’inspiration fondamentale.

L’ambiguïté sexuelle affichée, une certaine idée de la décadence vestimentaire et comportementale, mais aussi la défonce en étendard et, en définitive, le manque de succès immédiat, conduisirent ses membres à se séparer rapidement. David Johansen, le chanteur, se lança dans une carrière de crooner de second rang et d’acteur pour seconds rôles dans quelques séries US, Sylvain Sylvain, l’un des guitaristes, dans une carrière solo au succès mitigé malgré un bon album au début des années 80. Arthur « Killer » Kane, le bassiste, mena une vie d’errance pendant plusieurs années avant de se convertir au dogme mormon. Quant à Jerry Nolan et Johnny Thunders, ils furent les plus actifs des ex-poupées, en fondant notamment les Heartbreakers.

NYDolls
Au cours des deux années de leur courte existence, les New York Dolls produisirent deux albums, excellents : le premier, éponyme, mettait en avant une belle vitalité, un vrai sens de la reprise efficace et des compositions originales de qualité, dont le vigoureux « Personality Crisis », en extrait ci-dessous.

NewYorkDollsNewYorkDollsIl n’est ni très bien enregistré, ni très bien produit et ne rencontra guère de succès commercial à sa sortie –cliquer sur l’image pour la voir en grand-. C’est plutôt inclassable, ça démontre une belle assimilation des principaux courants du temps, assez stonien dans l’esprit et le traitement –propos ironique, utilisation de deux guitaristes complémentaires-, sans la finesse de ces derniers à la même époque, d’un enthousiasme réellement communicatif et d’une simplicité très directe si l’on pense aux standards du moment, où la musique évoluait vers une sorte de glam/progressive rock plutôt sophistiqué, un peu pompier et étiré. Suite à la parution de l’album, le groupe fut élu par Creem Magazine « Meilleur nouveau groupe » de l’année, mais aussi « Plus mauvais groupe de l’année », ce qui indique bien l’accueil plutôt controversé dont il bénéficia.

Too_Much_Too_Soon_-_The_New_York_DollsLe second album, « Too much too soon », –cliquer sur l’image pour la voir en grand-reproduisit les outrances du premier tout en étant beaucoup mieux produit. Il rencontra à peine plus de succès en termes de ventes en 1974, mais acquit rapidement le statut s’album fondateur de la musique punk : écouter l’introduction de « Human being » –en extrait ci-dessous : on prêtera attention à la guitare de Johnny Thunders –voie de gauche-, remarquable dans son traitement d’une sorte de mélodie continue et saturée– , c’est trouver la source de l’introduction du « Anarchy for the UK » des Sex Pistols, beaucoup moins bons musiciens au demeurant.

Après leur séparation et en raison du succès de la vague punk, plusieurs disques de démos ou d’enregistrements de concerts furent publiés : ils sont malheureusement mal enregistrés et n’apportent rien de fondamental à la découverte du groupe, qui, sur scène, ne transcendait pas ses compositions.
Un groupe attachant, malgré ses outrances plutôt qu’à cause d’elles –si elles furent revendiquées, elles ne furent jamais totalement assumées, comme le montre une séparation très rapide-, et entré dans la légende malgré la brièveté de son existence, grâce aux groupes punks anglais qui prirent leur relais avec bien plus de succès, trois ans plus tard.

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Louie Louie est mort…

LouieLouiePochetteTrès belle chronique, dans le Libération de ce jour, sur la disparition de Jack Ely, interprète du mythique « Louie Louie » –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-, chanson dont on apprend en outre qu’elle avait affolé le FBI –anecdote que vous découvrirez dans cet article, excellent-.

Le site du quotidien en propose par ailleurs quelques versions –dont une, assez décevante, d’Iggy Pop– :  la chanson, par sa simplicité ravageuse, a été reprise par un nombre incalculable de groupes, généralement au début de leurs carrières respectives –elle est très très très  simple à jouer, et comporte un riff efficace-.

Pour ma part, je vous en propose deux autres : • la première est celle des Flamin’Groovies, presque trop consistante -très longue introduction- eu égard au matériau de base;  • la seconde est celle de Johnny Thunders, à un stade de sa carrière où il tenait à peine debout, mais bourrée d’énergie malgré tout !

L’autodestruction comme un art

Hier, en cherchant tout autre chose, je suis tombé sur la vidéo que vous pouvez visionner juste en-dessous de la note… J’ai eu la chance et le privilège de voir Johnny Thunders, puisqu’il s’agit de lui, en concert, en 1983 si mes souvenirs sont bons, dans une petite salle « underground » aujourd’hui disparue. Le concert le plus court de ma vie, puisqu’ivre mort, il n’a pas tenu très longtemps après avoir marché sur le cordon de sa guitare et vidé la moitié de la bouteille de whisky entamée juste avant de monter sur scène: moins de trente minutes, c’est sûr…
Et pourtant, plein de sincérité et d’authenticité, le personnage reste à connaître. Clône avoué de Keith Richards, sans en avoir toutefois la santé, guitariste parfois éclairé mais également erratique, compositeur méritant lorsqu’il s’en donnait les moyens –à savoir : lorsu’il n’était ni totalement ivre, ni complètement stoned-, Johnny Thunders a connu une carrière qui est allée d’échecs commerciaux en échecs tout courts -une mort assez sordide dans des conditions jamais vraiment élucidées-, malgré de vrais éclairs de vrai talent.

Il reste de sa carrière décousue les deux albums des New York Dolls; où sa guitare de feu apporte une énergie nouvelle à l’époque; un album –L.A.M.F., excellent mais dans un mixage pourri– avec les Heartbreakers, qu’il fonda et conduisit à leur perte et, surtout un magnifique album solo –So alone– qui dit tout son mal-être… Il reste également une tonne de documents foireux, des disques mal enregistrés, témoignages de mauvais concerts, quand il tenait à peine debout et ne pouvait quasiment plus rien tirer de sa guitare…
La chanson de la vidéo –Sad vacation-est dédiée à Sid Vicious, le -très mauvais- bassiste des Sex Pistols, qui connut un destin presqu’aussi tragique… Entre 1’10 et 1’15, c’est presque comique. Et pathétique en même temps… Le seul punk romantique…

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