Playlist « Les belles prises de son ! »

J’ai trouvé il y a peu de temps à prix fracassé la première intégrale des symphonies de Sibelius par Neeme Jarvi, parue chez BIS au courant des années 80 et enregistrées à Göteborg, l’une des meilleures salles de concert d’Europe et du monde selon l’avis d’acousticiens et de musiciens.
Cette intégrale, que je déguste par étapes en profitant également des pièces d’accompagnement, est assez rapidement tombée dans les oubliettes de l’histoire du disque, reléguée par l’éditeur lors de la parution des symphonies de Sibelius par l’orchestre de Lathi dirigé par Osmo Vänskä, nouvelle référence aussitôt désignée par la presse spécialisée. C’est, à mon avis, profondément injuste : l’intégrale de Neeme Jarvi, chef estonien, n’est pas moins belle, mais très complémentaire et, surtout, remarquablement enregistrée. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

A l’aube de l’ère du Compact Disc, l’éditeur suédois BIS Records, encore tout jeune, avait beaucoup à prouver pour faire sa place sur le marché. Il le réalisa en proposant des prises de son somptueuses -très grande dynamique qui justifie l’avertissement des pochettes, timbres et spatialisation en largeur et en profondeur remarquables…-, éditées en CD puis en SACD, et un répertoire essentiellement centré sur les compositeurs et les orchestres nordiques –Sibelius, Grieg, Nielsen ; Oslo, Bergen, Göteborg, Lathi…-, qui s’est progressivement élargi ensuite.
Au sein de ma discothèque, tous les disques de cet éditeur font partie des tout meilleurs enregistrements, et cette intégrale des symphonies –qui est à mes oreilles la mieux enregistrées de toutes avec celle de Segerstam chez Ondine, label finlandais– fait partie de la crème de ces productions !
En 2023, BIS Records a été racheté par Apple, sans que l’on sache encore très précisément quel sera le mode de diffusion des futures productions.

Playlist « Révisions estivales »

Dans mon cahier de vacances, aujourd’hui, j’ouvre une page Sibelius, et j’y trouve cette intégrale des symphonies –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-. A la fin des années 80, j’ai découvert Sibelius, dont je ne devais alors connaître que Finlandia, à la radio, par le biais de sa deuxième symphonie –version George Szell-, comme de nombreux mélomanes sans doute, puisqu’il s’agit de la plus populaire de ses symphonies et qu’elle est assez facile d’accès, avec son finale hymnique.
J’ai accroché assez rapidement. Néanmoins, la version que je m’en offrais –un live de Beecham-, m’avait moins transporté et je l’avais un peu laissée de côté.

Persistant dans mon souhait d’en savoir un peu plus sur ce compositeur qui n’avait pas encore très bonne presse en France, j’ai donc acquis cette intégrale des symphonies par Kurt Sanderling : la toute première d’une longue série –à cette époque lointaine, c’était, très nettement, la moins chère– , et, somme toute, l’une de mes préférées si ce n’est l’une des toute meilleures : austère, granitique et sombre, à l’instar de l’intégrale des symphonies de Beethoven qu’il enregistra un peu plus tard.


Parmi d’authentiques pépites, la quatrième symphonie, notamment, est absolument remarquable !

Playlist « Retrouvailles de vieilles connaissances »

Aujourd’hui, nouvelle journée de grandes chaleur et de quasi-sécheresse, je retrouve d’anciennes connaissances : des enregistrements assez anciens, dont les bandes remontent, pour les plus anciennes à 1948 –Beethoven– et les plus récentes à 1957 –Schumann-. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

La 5ème symphonie a été couronnée « meilleure interprétation de l’oeuvre » par un parterre de chefs d’orchestre réunis par Nikolaus Harnoncourt lors d’une discographie comparée ; c’est en effet une très bonne version, qui fut remarquablement mal accueillie en France lors de sa sortie par la revue « Disques » : trop rapide et trop triomphalement brutale paraît-il ! Jugez-en par vous-même !

La « Flûte enchantée » , de Mozart, est une version sans dialogue, réunissant une distribution dominée, à mes oreilles, par le Papageno d’Erich Kunz, qui est resté, selon moi, inégalé. L’enregistrement fut longtemps regardé comme une référence, mais la prise de son a vieilli et l’absence de dialogues rend l’histoire assez peu compréhensible.
Excellents disques de Schumann –dans la meilleure de ses symphonies à mon avis, sachant que je n’écoute quasiment jamais les trois autres– et de Sibelius, dont le chef fut un ardent défenseur dès le début des années 30 et qu’il enregistra tôt dans sa carrière avec le Philharmonia.

Playlist « Le seul à comprendre… »

« Karajan est le seul à comprendre ma musique ». Ainsi s’exprimait Jean Sibelius au début des années 50, soit vers la toute fin de sa vie, et alors qu’il avait eu l’occasion d’entendre de très nombreuses interprétations de ses oeuvres par de nombreux chefs d’orchestre. Il aimait tout particulièrement, chez le chef autrichien, le côté lisse, immobile et poli des interprétations qu’il proposait.
La playlist de ce jour est ainsi consacrée à ces témoignages, datant tous des années 60 et font partie des tout premiers qu’il enregistra pour la firme Deutsche Grammophon –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– .

Karajan, amoureux de la nature et des grands espaces, ne pouvait qu’être impressioné et séduit par la musique de Sibelius, fortement influencée par les paysages finlandais vides de toute trace humaine.
Il commença à le diriger très tôt dans sa carrière, exigea que le premier concert donné avec le philharmonique de Berlin comporte une oeuvre de Sibelius –la sixième symphonie– et on trouve pas moins de 68 concerts consacrés au compositeur., dès 1938 –époque « Wunder Karajan » avec l’orchestre d’Aachen, et où Sibelius était encore très peu interprété, en Europe ou ailleurs– et jusqu’à 1983, avec une prédilection marquée pour la cinquième symphonie –26 concerts-. Il ne se rencontrèrent cependant jamais, au grand regret du chef autrichien, dont la seule tournée en Finlande eut lieu en 1965 : il profita cependant pour se recueillir sur la tombe de Sibelius : il en reste une photographie célèbre –cf. cliquer sur l’imagette de droite pour la voir en plus grand-.

On compte également pas moins de 33 enregistrements officiels consacrés à Sibelius –symphonies (toutes sauf la troisième), poèmes symphoniques, concerto pour violon-, et la somme des oeuvres écoutées ce jour reste, pour de nombreux musicographes ou critiques, l’un des sommets de la discographie de ces oeuvres, sans cesse rappelées en « références » plus ou moins absolues selon les pays et les époques.
Glenn Gould, l’iconoclaste pianiste, qui découvrit Sibelius grâce à Karajan, considérait d’ailleurs cette version de la cinquième symphonie comme « le plus grand disque de l’histoire de l’enregistrement ».

Playlist venue de l’est

Evidemment, de nos jours, le rideau de fer est oublié et l’on ne se souvient plus qu’au sortir de la seconde guerre mondiale, nombreux furent les artistes qui durent faire le choix d’émigrer vers l’ouest ou de demeurer à l’est, où se construisait l’autre Europe, derrière ce qui apparaîtrait rapidement comme un rideau de fer.

Kurt Sanderling, immense chef d’orchestre, fit quant à lui le choix curieux de rester à l’est où il s’était réfugié durant la guerre. Assistant de Mravinsky à Leningrad, il occupa ensuite le poste de chef de l’orchestre symphonique de Berlin, créé en 1952 à Berlin-est, et qui n’atteignit jamais au prestige de son concurrent, les Berliner Philhamoniker, avant de fuir sa longue carrière –il est mort à 99 ans et s’est retiré à 90– à Stuttgart après la chute du mur et la réunification allemande. A partir de la fin des années 1970, il dirigea également le Philharmonia Orchestra, à Londres, qui lui proposa d’ailleurs d’enregistrer toutes symphonies de Beethoven –première intégrale en numérique de l’histoire du disque-.

La playlist de ce jour –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– met en évidence ses qualités : dans un répertoire archi-connu, Kurt Sanderling propose des interprétations généralement puissamment architecturées, sur des tempi le plus souvent lents, et mettant en valeur tous les pupitres des très bons orchestres dont il dispose. On a souvent fait le parallèle avec Otto Klemperer –et les deux chefs présentaient le même physique austère-, ce qui n’est que partiellement exact à mes oreilles : il met beaucoup plus de couleurs dans les interprétations qu’il nous livre. 

Playlist nocturne « 3 x 2 »

Evidemment, après avoir dernièrement intitulé une playlist 32 x 32, la présente playlist fera « petit joueur » ! Elle est consacrée à trois « deuxièmes symphonies », dont deux que je n’écoute quasiment jamais. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Pour commencer, j’ai presque redécouvert le deuxième symphonie de Beethoven, sans doute la plus généralement mal-aimée de son corpus, et qui fut tout aussi mal accueilli lors de sa création, tant à Leipzig –« […] un monstre mal dégrossi, un dragon transpercé et qui se débat indomptable et ne veut pas mourir, et même perdant son sang dans le finale, rageant, frappe en vain autour de soi de sa queue agitée ». – qu’en France –« […] après avoir pénétré l’âme d’une douce mélancolie, il la déchire aussitôt par un amas d’accords barbares. Il me semble voir renfermer ensemble des colombes et des crocodiles ». – ; la légende affirme que Berlioz s’enfuit, épouvanté, à l’audition de certains fragments de la symphonie !
Evidemment, à nos oreilles habituées à bien plus de dissonances, cette symphonie ne produit plus le même effet, mais cette écoute nocturne et attentive m’a permis de l’apprécier –et d’en apprécier cette version– bien plus que d’habitude !

La deuxième symphonie de Bruckner jouissait à peu près d’un même délaissement de ma part, et je la connais nettement moins bien que les 4, 5, 7, 8 et 9. Ici, dans sa version originale de 1872, avec ses pauses et ses ruptures, un chef de second rang, Georg Tintner, quasi-inconnu en Europe au moment de la parution de de disque –et qui bénéficie désormais d’une aura quasi-mythique dans les pays anglo-saxons-, à la tête d’un orchestre de troisième zone –et cependant excellent– en donne une interprétation de premier ordre, dans une prise de son très convenable. L’intégrale très complète des symphonies est disponible à prix raisonnable et s’avère d’un très bon niveau d’ensemble.

Enfin, j’écoute désormais moins souvent la deuxième symphonie de Sibelius, qui fut la toute première oeuvre que je découvris du compositeur finlandais, à la fin des années 80. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts… Mais son finale hymnique est toujours aussi emballant, et c’est une très grande versions que j’ai mis entre mes oreilles dans cette playlist !

Playlist vieux crins-crins !

Après une assez longue période de disette, pour cause de « pas le temps », je révise aujourd’hui quelques grands concertos pour violon du répertoire, dont certains sont immensément populaires –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– dans des versions un peu anciennes –globalement : fin des années 50 – début des années 60-, mais dans d’excellentes conditions techniques : les prises de son d’origine sont soignées, le remastering est excellent –et le prix de l’objet tout petit lorsque je l’avais acheté il y a plusieurs années…-.

Jasha Heifetz, surnommé l’empereur des violonistes, ou le pape des violonistes selon le cas, fut incontestablement le plus exceptionnel maître de son instrument au vingtième siècle.
Enfant prodige de l’instrument –cliquer sur l’image de droite pour la voir en plus grand-, très tôt « starifié » en Europe puis, surtout, aux États-Unis où il émigra, doté d’une technique fabuleuse et d’une sonorité immédiatement identifiable, il livre dans ces concertos des versions invariablement virtuoses –ce qui n’est pas un contre-sens si l’on y réfléchit : les concertos sont généralement écrits pour faire briller un soliste…-, rapides, profondément asentimentales –l’homme était réputé ne jamais sourire…- et pourtant totalement incarnées, assez loin de la guimauve que peuvent y mettre certains.

Tous ces enregistrements le placent très près du micro, les accompagnements orchestraux, de qualité variables –la star, ici,, malgré le renom de certains chefs qui l’accompagnent, c’est le violoniste, qui impose sa vision des oeuvres ! -, étant le plus souvent placés au second plan.

Une fort belle anthologie, très variée et très bien rééditée !

Playlist « Aurores boréales »

Levé avant l’aube malgré –ou à cause ?! du décalage horaire-, j’écoute tranquillement cette playlist consacrée à un chef qui s’est énormément et constamment préoccupé d’enregistrer des oeuvres de musiciens issus « du Grand Nord », du fait, notamment qu’il est estonien, et donc investi d’une mission pour populariser la musique issue des états baltes et scandinaves ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Avec l’excellent orchestre symphonique de Götenborg –Gothenburg en suédois-, dont il fut titulaire pendant plus de 20 ans –de 1982 à 2004-, Neeme Järvi, désormais âgé de 83 ans mais toujours actif, a enregistré tout au long de sa carrière, d’innombrables disques consacrés à des musiciens alors peu connus –hors Sibelius, Grieg et, dans une moindre mesure le Danois Carl Nielsen– en proposant des pièces d’ampleur modeste –sur l’album « Aurore », on l’on trouve des piécettes d’Alfvén de Larsson ou encore de Järnevelt– mais également des oeuvres plus ambitieuses, comme, dans cette playlist, les symphonies ou la Fantaisie « Excelsior ! » de Stenhammar.
Tout n’est évidemment pas exceptionnel dans certaines pièces de circonstance, mais rien n’y est indigent non plus, et le premier album présenté s’écoute avec beaucoup de plaisir.

La musique de scène de « Peer Gynt », de Grieg, est livrée ici dans une version plus longue –mais non intégrale– que les traditionnelles suites pour orchestre que l’on entend habituellement, avec chanteurs et choeurs.

Les symphonies de Nielsen trouvent ici une excellente interprétation, puissante mais sans emphase, et dans une très bonne prise de son. Je n’ai pas de point de comparaison pour le disque consacré à Stenhammar, mais j’ai beaucoup apprécié sa deuxième symphonie –la seule du compositeur à faire partie de son catalogue officiellement publié : il renia la première et l’in ne possède que des fragments d’une troisième, inachevé-, fortement influencée par Sibelius.

Une bien belle matinée !

Playlist lumineuse

Il me reste encore un peu de temps pour profiter de quelques écoutes nourrissantes avant une reprise vraisemblablement inscrite sous les mêmes auspices que l’année dernière, crise sanitaire oblige : on n’est pas prêts de tomber les masques, malheureusement ! –Cliquer sur l’image pour a voir en plus grand-.

• La version du « Don Giovanni » de Mozart est un enregistrement public bénéficiant d’une assez bonne qualité sonore et d’une excellente interprétation, très contrastée : les passages les plus lents sont très lents, les passages les plus rapides sont très vifs, les récitatifs sont vivants et les chanteurs principaux sont tous excellents –les voix de Don Giovanni, Leporello et du Commandeur sont bien différenciées, ce qui n’est pas toujours le cas– et l’on tient là, en effet, face à un « drame joyeux », ainsi que l’indique le livret. Je n’y reviendrai pas tous les jours, n’appréciant pas outre mesure cet opéra –mode provocation on : j’ai autre chose à faire que d’écouter du Mozart. Mode provocation off-, mais, de temps à autre, c’est tout-à-fait plaisant, et cela me rappelle mes études d’histoire de la musique, durant lesquelles nous avons décortiqué cet opus de manière très approfondie –à mon grand désespoir : à l’époque, j’aimais encore moins Mozart que maintenant ! -.

• Les symphonies de Sibeliuscompositeur totalement et injustement ignoré durant ces mêmes études, mais alors (fin des années 80), Sibelius n’avait pas si bonne presse en France-, ici écoutées nuitamment, font partie de la seconde intégrale enregistrée par le chef finlandais Osmo Vänskä, avec l’orchestre symphonique du Minnesota dont il est titulaire depuis près de vingt ans. Sa première intégrale, avec l’orchestre finlandais de Lahti, avait été très remarquée et unanimement saluée, la seconde ne me semble pas moins réussie, malgré un accueil un peu moins chaleureux que la première par la presse spécialisée. Les contrastes de tempo et de dynamique sont un peu plus exacerbés, et la prise son s’avère exceptionnelle –comme toujours chez cet éditeur-. Mention particulière pour la lumineuse sixième symphonie –d’où le titre de cette notule-, tout-à-fait remarquable. –cf. extrait ci-dessous-.

Bon, il est temps pour moi de me consacrer à ma petite heure quotidienne de gammes chromatiques et d’enchaînements d’accords…

Playlist pour temps de disette

Mes oreilles ont été remarquablement peu nourries ces derniers jours, où aucune note de musique n’est venue s’y glisser : c’était à peu près prévu –fastidieux déplacements et journées à rallonge et très chargées-, mais pas forcément à ce point-là !
Du coup, je profite du week-end pour écluser un peu la pile des CD restés en attente : parmi cette pile, un beau coffret anthologie consacré à des interprétations «légendaires» de diverses oeuvres de Jean Sibelius, dont je commence à peine l’écoute –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Le coffret, assez joliment présenté, compte 11 CD, disposant chacun d’une pochette cartonnée proposant un identique visuel et non pas, malheureusement, les antiques pochettes d’origine, ainsi qu’un livret –en Anglais– de très bon niveau informatif. Les prises de son, pour ce que j’en ai entendu, semblent avoir été revivifiées par un travail de production et de remastérisation très soigné.
• Le quatuor « Voces Intimae » est le deuxième enregistrement –en 1950– de cette merveilleuse oeuvre, c’est une belle version, mais le niveau d’ensemble des formations de musique de chambre s’est considérablement élevé depuis cette date et on trouve désormais des versions d’un bien meilleur fini d’ensemble.
• La cinquième symphonie est sans doute celle qui compte la discographie la plus riche parmi les sept du compositeur et reste d’un accès assez facile, même pour un mélomane néophyte. La version écoutée aujourd’hui –le coffret en propose deux autres– est l’une des toute premières enregistrée –juin 1952– à une époque où le compositeur, très en vogue et jouissant d’une considération formidable Outre-Rhin, Outre-Manche et outre-Atlantique, était encore très peu connu en France, voire particulièrement honni puisque considéré par le chef d’orchestre René Leibowitz, dans un pamphlet publié en 1955 et resté célèbre, comme « le plus mauvais compositeur du monde ». Je ne résiste pas à vous en livrer ces extraits !

« Le mélomane ou musicien éduqué en France ne sait pas grand-chose de Sibelius. Il se peut que l’on connaisse son nom, que l’on sache qu’il est Finlandais en même temps que l’auteur de la ‘Valse triste’ et il se peut même que l’on ait entendu cet inoffensif échantillon de la musique de salon. Mais si l’on suit l’activité musicale anglaise ou américaine, l’on s’aperçoit que le nom de Sibelius, à peine prononcé chez nous, se présente à peu près aussi souvent que les marques célèbres d’automobiles, de cigarettes ou de pâte dentifrice. Les critiques se surpassent en dithyrambes. Toscanini affirme qu’il s’agit du ’plus grand symphoniste depuis Beethoven’ et il existe même une ’Société Sibelius’ qui s’est imposé le but d’enregistrer et de propager ses oeuvres. La stupéfaction et la curiosité s’emparent de vous …
On consulte une partition, choisie parmi les oeuvres les plus importantes (par exemple la Cinquième Symphonie). La stupéfaction croît, la curiosité diminue: la partition offre un image où s’étalent une pauvreté et une misère à peine concevables. Mais les admirateurs de Sibelius de vous rassurer : ’Attendez l’audition, vous verrez…’ Hélas, l’ouïe ne dément pas ce que la vue avait perçu.
Cela se présente à peu près comme suit : quelques vague figures sonores sans consistance, banales et vulgaires assument le rôle des ‘thèmes’. Leur allure est maladroite, leur harmonie incorrecte, pauvre et schématique. Soudain leur cours se trouve interrompu, sans que l’auteur ait songé à en tirer les quelques conséquences dont – malgré tout – ils étaient capables. Puis voici que ces thèmes réapparaissent, sans rime ni raison, sans liens avec ce qui précède et ce qui suit ; triturés, tordus, plus maladroits et plus pénibles encore que lors de leur première apparition.
– L’indigence rhythmique et mélodique : mais ce sont des qualités de symphoniste de Sibelius, qui, tel Beethoven, réussit à tirer le maximum des éléments les plus ’simples’, etc… C’est alors que l’angoisse vous saisit et l’on fait part de ses doutes aux ’admirateurs’. Comme de juste, c’est vous qui n’avez pas compris.
– L’harmonie qui vous paraît fausse : mais c’est cela précisément qui constitue l’originalité de Sibelius.
– Le manque de développements : mais c’est justement sa force, c’est ce qui le situe ’au-dessus des écoles’. On a du mal à croire aux vertus du travail symphonique de celui qui ne paraît pas capable de construire une période; on n’est pas très convaincu par ce ’vol plané’, au-dessus des écoles, de quelqu’un qui à l’école a dû être un cancre… ».

Je raffole de cette mauvaise musique : Sibelius est le troisième musicien le mieux représenté dans ma discothèque, après Beethoven et Wagner !