Un dimanche d’hiver à l’opéra, encore !

Il ne neige plus, il beaucoup plu et pourtant, le marché de Noël –Christkindelmärik pour les locaux– est toujours bondé chaque jour, rançon d’un succès chaque année renouvelé ! C’était encore la cas hier, bien plus que le week-end précédent, et pourtant, en début de semaine, la préfète avait dit à la maire: « Ça suffit, il y a trop de monde, faisons une réunion pour renforcer les mesures de sécurité !!! ».
En réalité, cela ne paraît pas très probant selon ce que nous avons expérimenté hier ! Je pense donc devoir revérifier cette après-midi, profitant au passage d’un gobelet de vin blanc chaud !

En attendant, n’ayant pas le temps nécessaire pour écouter l’opéra en entier ce matin, je suis néanmoins installé dans mon confortable fauteuil d’opéra, et j’écoute selon différentes versions –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– la marche funèbre dédiée à Siegfried et ce qui en suivit : Gutrune éplorée et, surtout, l’immolation de Brünnhilde qui clôt le Crépuscule des dieux, de Wagner.

Toutes ces versions sont fort cohérentes chacune dans leur genre, avec des partis-pris assumés, même si ce ne sont pas forcément mes préférées et que j’ai un « modèle » en tête –Varnay / Krauss– auquel je les compare toujours, même inconsciemment.

Si vous voulez trouver un Ring de qualité pour une bouchée de pain dans un son très décent, la version de Günther Neuhold devrait reste accessible à des prix décents, mais je n’ai pas vérifié : elle était proposée à prix vraiment fracassé –moins de 20€ le coffret de 14 CD !– à une époque –selon les éditeurs, l’iconographie du boîtier peut varier-. Elle vaut largement son prix, et même mieux que cela !

Un dimanche d’hiver à l’opéra

Il a neigé hier et neigeouillé cette nuit et j’en profite de cette matinée et de la chaleur douillette de l’appartement pour écouter « un peu fort » l’un de mes opéras préférés, dans une version sonore et ivre de ses sonorités : Wagner – Die Walküre, version Solti, 1965. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Premier enregistrement en studio de cet opéra -et donc pensée et conçue par le producteur de l’époque comme une aventure destinée à être écoutée dans un cadre domestique, ce qui explique certains choix techniques, cette version fut particulièrement soignée par les équipes techniques de Decca, et jouit, depuis la période de sa première parution, d’une réputation de « version de référence » que les années n’ont pas totalement ternie : pensez-donc : on y retrouve notamment Hans Hotter, le Wotan du siècle –capté ici bien tard, mais dont les Adieux restent émouvants-, mais aussi Nilsson, qui fut une grande Brünnhilde –pas ma tasse de thé personnellement, mais grande voix qui convient très bien dans ce contexte– et un philharmonique de Vienne redevenu l’excellent orchestre qu’il avait été avant la guerre –il avait pâti, comme peu d’autres orchestres, de la seconde guerre mondiale, et les enregistrements de la fin des années 40 et jusqu’u milieu des années 50 sont parfois cruels quant à son niveau…-.

En réalité, tout cela est très plaisant, et vaut mieux que la réputation acquise auprès de certains cercles wagnériens de « version surcôtée juste parce que c’est la première parue ». Dans les faits, on y trouve de fort belles choses, et, surtout, le remastering de très grande qualité paru en 2012, rendant cette luxueuse version enfin accessible à un tarif décent -cliquer sur l’image ci-dessous pour la voir en plus grand- permet de rééquilibrer un peu des cuivres tonitruants dans les premières éditions, et vient considérablement atténuer le souffle de bande de la première édition en CD, disponible pendant très longtemps à prix très fort ! Manque évidemment l’urgence des meilleures versions live enregistrées à Bayreuth… Mais quel confort sonore cependant !

Bref, que du bonheur !

Dernier dimanche à l’opéra -avant la reprise-

Durant notre séjour sur la Côte d’Opale, « profitant » d’une nuit d’insomnie, j’ai écouté un assez grand nombre d’albums de musique de Francis Poulenc et de Gabriel Fauré, compositeurs qui ne me sont pas vraiment familiers –comme à peu près tous les musiciens français, hors Ravel et Satie…-, et y ai trouvé un assez grand nombre de beautés cachées, ce qui m’a donné envie de réécouter « Pénélope », de Gustave Fauré, que j’ai vu en 2015 à l’opéra national du Rhin, sans en garder un très bon souvenir, du fait notamment d’une mise en scène très décevante –à mes yeux tout au moins, mais comme elle était signée d’un « grand nom », certains ont cru devoir se pâmer malgré tout…-.
A l’époque, j’avais acheté cet album, alors seule version facilement accessible, –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– pour découvrir l’oeuvre avant d’aller l’écouter à l’opéra, mais il n’avait plus quitté son étagère depuis, Pénélope m’était complètement sortie de l’oreille : je ne dois pas être le seul dans ce cas, puisqu’après une création triomphale, l’oeuvre a peu à peu son gré dans un oubli relatif.

L’argument est tiré de « L’Odyssée » d’Homère –le livret est signé de René Fauchois-, et narre le retour d’Ulysse, déguisé en mendiant, et sa vengeance contre les prétendants de Pénélope, qui, depuis vingt ans, attendait son retour en tissant sa toile et en refusant de se marier.
Dit comme ça, on pourrait s’attendre à un livret plein de rebondissements et à un suspens haletant, mais en fait, il ne se passe quasiment rien pendant deux heures et trois actes, et seule le dernier quart de l’oeuvre est plus animé. En revanche, l’oeuvre semble construite sur le modèle wagnérien, avec découpage en scènes et non en numéros, et ne comporte quasiment pas d’airs, mais propose une suite de déclamations, sur une trame orchestrale –nettement dominée par les cordes– dense et, pour le coup, vraiment intéressante.

Je me souviens qu’à Strasbourg, le rôle de Pénélope était interprétée par une grande voix straussienne ; on y entend également des cantatrices estampillées wagnériennes. Ici, Jessye Norman continuait à bâtir sa galerie de « portraits français » –entre autres : Pénélope, Cassandre (Berlioz) Hélène et Antonia (Offenbach), Salomé (Massenet) Carmen (Bizet) et la Marseillaise du bicentenaire ! -. Elle se montre tout-à-fait convaincante et écrase un peu ses partenaires masculins.
L’orchestre, par ailleurs, protagoniste important de l’oeuvre, semble convenable –je n’ai pas d’autre point de comparaison– bien qu’un peu opaque pour une orchestration qui nécessite sans doute plus de transparence. On a également connu le chef d’orchestre suisse Charles Dutoit autrement plus énergique et fougueux avec son orchestre de Montréal que dans cet enregistrement.

Deux heures pour finir agréablement ces vacances lyriques !

Un nouveau dimanche à l’opéra…

Profitant d’une météo pour l’instant peu clémente et qui n’incite pas trop à sortir, je passe cette matinée à l’opéra en compagnie de « Der Freischütz », de Carl Maria von Weber, dont je vous ai parlé il y a très peu de temps. L’oeuvre s’inscrit dans le premier romantisme allemand, et prend la forme d’un Singspiel, comme « La flûte enchantée », de Mozart, ou « Fidelio » de Beethoven. Cette dernière appellation semble quelque peu réductrice, et on parle plus volontiers désormais, pour qualifier l’oeuvre de Weber, de « premier opéra romantique allemand avec dialogues parlés », en l’inscrivant comme point de départ d’une lignée qui conduira à Wagner, via Marschner. Pour en savoir plus, et notamment comprendre le contenu de cette histoire diabolique où le héros vend son âme au diable, vous pouvez vous rendre ici.

J’avais le choix, pour cet opéra, entre deux versions très réputées : celle de Carlos Kleiber, bardée de prix à sa sortie et toujours citée en version princeps, et celle de Rafael Kubelik, à peine moins hautement estimée, sortie peu de temps plus tard.

J’ai opté pour la première –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-, que je n’avais plus écoutée depuis des lustres, et qui est effectivement très bien dirigée et globalement très bien chantée.
Elle mérite vraisemblablement les critiques dithyrambiques ayant salué sa publication, mais je manque de points de comparaison pour confirmer ou infirmer ces louanges, et, très honnêtement, la version de Kubelik me semble aussi bien chantée et dirigée.
L’unique défaut de la version de ce jour, à mes oreilles, est se proposer, pour les dialogues parlées, des acteurs de studio : c’était une des grandes spécialités de l’époque chez DGG, qui avait recruté une équipe d’acteurs –ce sont assez souvent les mêmes noms qui reviennent dans les différentes productions– en charge des dialogues dans de très nombreux opéras en Allemand. Cela vient quelque peu briser la continuité de l’écoute, les timbres des acteurs étant forcément différents de ceux des chanteurs.

Pâques à l’opéra – Opéra de Pâques

Cela fait quelques années que je ne vais plus écouter, chaque vendredi saint, l’une ou l’autre Passion selon l’un des évangélistes mise en musique par Bach : elles y sont invariablement données, en alternance, à l’église Saint Guillaumeen réalité, c’est un temple luthérien à la formidable acoustique-, dont la particularité est, outre de ne pas être efficacement chauffée –ce qui peut être perturbant lorsqu’une oeuvre d’étend sur plus de deux heures-, de présenter une architecture biscornue –un plan en trapèze et un drôle de clocher non symétrique qui perturbe la perspective-. Le choeur de la paroisse est très réputé, et a été dirigé, notamment, par Furtwängler, mais aussi, plus récemment, par Gardiner. Les Passions entendues dans l’église s’inscrivaient toutes dans une veine assez traditionnelle –c’est aussi pourquoi je n’y vais plus-, il serait intéressant d’écouter si, enfin, certains préceptes HIP ont commencé à être investis…

Aujourd’hui, vendredi saint, donc, et jour légalement férié ici seulement, j’écoute « Parsifal » : un opéra de Pâques, qui n’est d’ailleurs pas conçu par son créateur, Wagner, comme un opéra, mais comme un « festival scénique sacré ». Il faut dire que la charge de « mysticisme sacré » est assez prononcée, avec lance sacrée, blessure incurable sauf par la grâce de dieu –et de la lance sacrée-, héros naïf et égaré –Parsifal, qui sera plus tard le père de Lohengrin, autre héros wagnérien– durant toute une partie de l’histoire, gentil moine-tuteur et méchant magicien ayant renié sa foi, chevaliers de la table ronde et filles-femmes forcément tentatrices  – très « femelles » en réalité, et c’est à peu près leur seule vocation ici-.

La version de ce jour –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-, dans un son tout beau tout neuf, par un éditeur spécialiste de la rénovation d’antiques bandes et qui ne fait que cela –cf. extrait 1– date de 1953 ; elle est très vive sans être précipitée et absolument formidable de tension et de magnifiques clairs-obscurs. Ma version préférée –du moment...-, d’autant qu’elle est désormais disponible dans un son satisfaisant.

Tous les grands noms du Neues Bayreuth y sont représentés, chaque rôle, ou presque, est tenu par une légende vivante et les choeurs sont remarquables –cf. extrait 2-. Bref, de quoi passer une belle matinée pour entamer ce week-end de Pâques !

PS. A titre anecdotique, Parsifal est le seul opéra que j’ai vu/entendu quatre fois, dans quatre mises en scène différentes et de qualité très variable…

Après cela, les cloches peuvent s’envoler…

Un nouveau dimanche matin à l’opéra

Ce matin, c’est une oeuvre légère à souhait qui est à l’honneur : « Die Fledermaus » –La chauve-souris-, de Johan Strauss fils.
Un vaudeville à la viennoise composé en 1874, au livret à peu près aussi embrouillé que les opérettes parisiennes d’Offenbach, proposant des alternances de numéros chantés et de plages de dialogues plus ou moins coupées selon les versions enregistrées.
A sa création, l’oeuvre connut un vrai succès, avec 68 représentations au Theater An Der Wien, malgré un accueil assez peu chaleureux des critiques musicaux de l’époque, qui n’y entendaient qu’une succession de valses et polkas. De nos jours, « La chauve-souris » est assez fréquemment représentée lors des soirées du réveillon de nouvel an sur de nombreuses scènes d’opéra.

Dans les environs de Vienne. Vers 1870.

Acte I, chez les Eisenstein
Après une ouverture où se mêlent beaucoup de thèmes que l’on entendra tout au long de l’oeuvre, le rideau se lève sur la maison de Gabriel Eisenstein et de sa femme Rosalinde. On entend au loin chanter Alfredo, un ancien amant de Rosalinde qui reconnaît immédiatement la voix de celui qu’elle a jadis aimé.

Adèle, la servante du couple, vient de recevoir une lettre de sa sœur Ida qui l’invite à un bal masqué. Elle demande à sa maîtresse l’autorisation de se rendre auprès de sa tante malade. Rosalinde refuse.
Alfredo fait son entrée dans la maison. Rosalinde insiste pour qu’il parte afin de ne pas être surpris par son mari qui doit incessamment arriver.
Eisenstein et son avocat, Me. Miro, reviennent tout juste du tribunal. Eisenstein a été condamné à huit jours de prison pour outrage au maire de la ville qu’il soupçonnait d’être amoureux de sa femme. Il accuse son avocat de ne pas l’avoir défendu correctement et même d’être à l’origine de l’allongement de sa peine. Congédié, Me. Miro part non sans assurer devoir se venger.
Dr. Falke entre à son tour et invite Eisenstein à un bal masqué. Il promet à son ami de rencontrer la plus belle fille de Vienne et de prendre du bon temps avant de rejoindre la prison. Dr. Falke désire en vérité se venger d’Eisenstein pour l’avoir laissé ivre, quelques temps auparavant, sur un banc dans son déguisement de chauve-souris au retour d’une soirée arrosée.
Eisenstein doit se rendre à la prison dans une heure mais Dr. Falke le convainc de se rendre d’abord au bal du Prince Orlofsky déguisé en marquis. Rosalinde, de son côté, organise le retour de son amant et autorise finalement le départ d’Adèle pour s’assurer d’être seule avec Alfredo. Elle reçoit un message du Dr. Falke qui l’invite à se rendre au bal déguisée en comtesse hongroise.
Rosalinde, Adèle et Eisenstein chante un trio d’adieux, tour à tour poignant et comique. Enfin seuls, Alfredo et Rosalinde dînent en tête à tête. Leur petite fête privée est interrompue par l’arrivée de Frank, gouverneur de la prison qui arrête Alfredo en pensant qu’il est Eisenstein.

Acte II, les salons du Prince Orlofsky
La fête bat son plein au bal masqué organisé par le prince Orlofsky dans sa magnifique villa, mais le prince s’ennuie. Dr. Falke lui promet du divertissement et lui explique comment il a réussi à piéger son ami Eisenstein en invitant Rosalinde et Adèle, toutes deux masquées. Eisenstein, déguisé en «Marquis Renard», noble français, fait son entrée et commence à courtiser les jeunes femmes. Il pense reconnaître sa servante Adèle, mais celle-ci, vêtue d’une robe de sa maîtresse fait montre d’un grand aplomb en se présentant comme une artiste répondant au nom d’Olga. Elle ridiculise Eisenstein devant tout le monde.

Un autre faux-noble fait son entrée : le « chevalier chagrin » n’est autre que Frank qui présenté au « marquis renard » marmonne quelques mots de mauvais français. On annonce alors l’arrivée d’une comtesse Hongroise, qui n’est autre que Rosalinde déguisée. Elle constate avec stupeur que son mari est au nombre des invités. Elle est présentée à son mari qui ne manque pas de tenter de la séduire. Elle parvient à lui dérober sa montre qui lui servira plus tard de preuve. On demande à la comtesse de chanter une « csardas » hongroise. On boit, on danse, on se divertit et… il est six heures du matin. Eisenstein-Renard et Frank-Chagrin doivent partir pour la prison, chacun pour des raisons bien différentes.

Acte III, la prison
À la prison, le gardien Frosch, ivre, tente de survivre au chant incessant d’Alfredo qui enchaîne les grands airs du répertoire. Frank fait son entrée encore enivré de champagne et évoque sa nuit de folie. Orlofsky et Dr. Falke ont suivi le gouverneur de la prison pour terminer la comédie.
C’est au tour d’Adèle et de sa sœur Ida de pénétrer dans la prison. La servante veut trouver un mécène qui saura mettre en valeur ses talents de comédienne. Elle se lance dans un numéro de bravoure pour preuve de son talent. Frank cache les deux jeunes femmes alors qu’on frappe à la porte.
C’est Eisenstein qui vient purger sa peine. Le gouverneur de la prison lui explique qu’il ne peut être le prisonnier puisqu’il l’a arrêté lui-même la veille alors qu’il dînait chez lui en compagnie de sa charmante épouse. Eisenstein est pris d’une jalousie féroce et s’empare de la perruque et de la robe de Me. Miro qui vient tout juste d’arriver. Il entreprend un véritable interrogatoire auprès de Rosalinde venue faire libérer son amant et l’accuse d’adultère. La montre, dévoilée par Rosalinde, fait tomber tous les masques et la fête s’empare de la prison envahie par les convives d’Orlofsky. Champagne !!!

La version écoutée ce jour, enregistrée en 1950-1951 –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– s’inscrit admirablement dans un esprit viennois indispensable à cette oeuvre. Il s’agit, d’un avis assez largement partagé sinon unanime, de la version idéale de l’oeuvre, même si elle ne comporte aucun dialogue.
En revanche, contrairement à une idée très répandue, il ne s’agit pas du premier enregistrement de l’opérette officiel : en 1949, Ferenc Fricsay en avait proposé une version presqu’aussi idéale, avec quelques dialogues et une troupe berlinoise à peine moins idiomatique. Outre ces deux versions déjà citées, deux autres se situent sur des sommets comparables : celle de Karajan en 1955 –dialogues abrégés– et celle de Carlos Kleiberdialogues-.