Playlist en couleurs – Bleu, encore…

The Beach Boys – Surfin’USA – 1963 ***
Gustav Holst – The Planets – Orch. Symph. de Boston, William Streinberg – 1971 *****
Gustav Mahler – Symphonie n°6 – Orch. Tonhalle Zürich, David Zinman – 2007 ****
Nirvana – Nevermind – 1991 ****
Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

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Playlist «Cinétique et contrepoint»

Belle –et exigeante– playlist composée d’oeuvres pour piano finalement pas si fréquentes que cela, aujourd’hui ! Et deux compositeurs contemporains l’un de l’autre en trois albums, dont l’un a le bon goût de proposer les deux ! Si le piano de Paul Hindemith est assez marqué pr l’utilisation d’un contrepoint savant –ses Ludus Tonalis sont édifiants à cet égard-, le piano de Serge Prokofiev met souvent en avant une motorique implacable. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

On retrouve donc dans cette playlist :

• Hindemith – Les sonates pour piano – Glenn Gould – 1966/1973 ****

Glenn Gould adorait les pièces contrapuntiques et ces sonates parfois assez arides et rarement enregistrées lui offrent l’occasion de s’en donner à coeur joie ! Ces trois sonates ont été composées en 1936, à un moment où Hindemith, désigné par es nazis comme « artiste dégénéré », commençait à songer à l’exil.

• Hindemith – Ludus Tonalis ; Prokofiev – Visions fugitives, intégrale – Olli Mustonen – 1996 *****

Un très grand disque de piano, fort bien enregistré. Les Ludus Tonalis –Études, ou exercices contrapuntiques, tonaux et techniques pour le piano : c’est ainsi que ces 25 pièces sont définies par leur compositeur– sont formidablement maîtrisés. L’oeuvre, écrite en 1942, est composée d’un prélude et de 12 fugues entre lesquelles s’intercalent 12 interludes et les Visions Fugitives sont des miniatures remarquables, même si les propositions d’Emil Gilels dans ce répertoire sont à mes oreilles encore plus merveilleuses.

• Prokofiev – Sonate pour piano n°8Visions fugitives, extraits – Emil Gilels – 1974 *****

Emil Gilels fut le créateur de cette sonate virtuose et exigeante en 1944. Par ailleurs, tout au long de sa carrière, il joua très souvent de manière admirable des extraits des Visions Fugitives en bis lors de ses concerts. Ces courtes pièces sans titre ont été inspirées par les poésies de Constantin Balmont.

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Playlist «Mes nuits sans dormir – La mer», et une devinette

Si ça continue, faudra qu’ça cesse… N’en pouvant plus de ne pas dormir, une nouvelle fois, je me suis concocté une petite playlist dévolue au thème de la mer, tout en essayant de ne pas y inclure « La mer » de Debussy, pièce assez souvent écoutée ces derniers temps, et y compris dans sa transcription pour pianos. Cependant, le notaire de Debussy fait partie de cette playlist, et c’est avec lui que prend place notre devinette du jour :

« Sa musique est une musique de notaire » : c’est ainsi que Debussy méprisait l’un des trois compositeurs de cette playlist. A votre avis, de qui parlait-il ?

Nonobstant ces considérations, la playlist de cette nuit est donc composée de marines de la plus belle eau. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

• Felix Mendelssohn – Les Hébrides, ou la Grotte de Fingal. ***** Une superbe composition – en forme d’ouverture pour orchestre-, écrite en 1830 lors du voyage de Mendelssohn en Écosse. Excellente analyse de l’oeuvre avec quelques exemples musicaux à lire et écouter ici.

• Jean Sibelius – Les Océanides. **** Un court poème symphonique, qui n’est pas l’oeuvre la plus connue de Sibelius, contemporain de sa célèbre 5ème symphonie –1914-. Lors de sa création la pièce, qui évoque les nymphes méditerranéennes de la mythologie grecque, fut louée comme «la plus belle évocation de la mer en musique». Un affront pour Debussy, dont « La mer » fut créée en 1905 et reçut un accueil défavorable, pour le moins : « Le public semblait plutôt déçu : ils s’attendaient à l’océan, quelque chose de grand, quelque chose de colossal, mais ils ont été servis à la place avec de l’eau agitée dans une soucoupe » – Matthew Parris

• Granville Bantock – Symphonie des Hébrides. **** Une symphonie d’inspiration à la fois folklorique et wagnérienne composée en 1913, il fut le dédicatoire de la troisième symphonie de Sibelius dont il était un ardent défenseur en grande-Bretagne. Sur cet album, à la prise de son d’exception, la Celtic Symphony est à mon avis encore mieux réussie, mais ne concerne pas la mer.

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Playlist «Mes nuits sans dormir – Handel»

Le sommeil ayant décidé de me fuir totalement cette nuit, j’en ai profité pour écouter l’ensemble des 12 Concerti Grossi opus 6 de Georg Frideric Handel, que de nombreux musicographes n’hésitent pas à placer sur les mêmes sommets que les Concerti Brandebourgeois de J.S. Bach et que, personnellement, je préfère assez largement à ces derniers ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.


Il s’agit d’oeuvres qui m’accompagnent depuis très longtemps : Handel  faisant partie de longue date du quinté de mes compositeurs préférés, ces disques furent parmi les premiers que j’achetais en CD, et je les ai donnés récemment, lors de l’achat du superbe coffret consacré à Trevor Pinnock et à son orchestre, The English Concert.

Les 12 Concerti Grossi opus 6 ont été écrits par Handel en moins d’un mois en 1739 –Handel a toujours eu la capacité de composer à très grande vitesse-, sur le modèle des concerti grossi de Corelli, en cinq mouvements : un trio concertino de deux violons et d’un violoncelle dialogue avec l’orchestre à cordes ripieno en quatre parties avec clavecin continuo. Le terme « écrit » est partiellement impropre : « rassembler » conviendrait mieux pour certains concerti, dans la mesure où Handel réutilise du matériau qu’il avait déjà employé dans d’autres oeuvres ; c’est le cas pour les n°1, 5, 8, 9 et 11. Les autres sont nouvellement composés ou ne réutilisent que très partiellement des fragments d’oeuvres déjà composées., ce qui constituait une pratique fréquente à l’époque.

L’interprétation de Trevor Pinnock est magnifique : c’est frais et joyeux, tonique et vivifiant, sans outrance mais avec une touche d’élégance qu’on ne trouve dans aucune des autres versions que je connais –au bas mots : une dizaine…-, somptueusement enregistré -les enregistrements d’Archiv Musik du début de l’ère digitale, ici 1982, sont tous excellents et, de plus, offrent généralement de jolies pochettes – dans une ambiance très légèrement réverbérée qui apporte une belle aération sans nuire à la lisibilité des lignes, essentielle dans ces oeuvres. Ces disques restent accessibles à relativement peu de frais en occasion ici : vous pouvez vous précipiter, l’ensemble de ce coffret, qui dispose de surcroît d’un très bon et exhaustif livret traduit en Français, est du plus haut niveau !

Parfois, les insomnies ont du bon !

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Dimanche à l’opéra – La Dame de pique, de Tchaïkovsky

Ma séance lyrique dominicale me conduit en Russie, à Saint-Pétersbourg -ex-Petrograd, puis ex-Leningrad avant de retrouver son nom originel-sur les bords de la Neva, où Piotr-IllitchTchaïkovsky résida une grande partie de sa vie. cependant, c’est lors d’un séjour à Florence, en 1890, qu’il composa « La Dame de pique », opéra en trois actes dont le livret, de son frère Modeste, est adapté, avec de nombreuses libertés, d’une nouvelle d’Alexandre Pouchkine.
Tchaïkovsky a composé un opéra puissamment dramatique, mêlant tout à la fois romantisme lyrique –encore exacerbé par le livret : la cupidité d’Hermann, dans la nouvelle, est transformée en obsession morbide dans le livret– et éléments surnaturels. L’opéra suit une forme mixte en reprenant un certain nombre d’éléments du grand opéra français –mascarade, chœurs, danses– et opéra psychologique russe –obsession morbide, désespoir, passion amoureuse destructrice…– .

Je n’en ai qu’une version en discothèque –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-, déjà relativement ancienne –1977-, achetée il y a suffisamment longtemps pour que je ne me souvienne plus quand exactement, alors que l’oeuvre était encore relativement peu enregistrée en Europe occidentale et assez rare dans les bacs des disquaires. Elle me semble suffisamment convenable pour ne pas avoir envie d’en découvrir d’autres, même si des versions plus récentes dont j’ai pu entendre ic ou là des extraits exposent sans doute mieux le versant profondément russe de l’oeuvre. C’est, par ailleurs, un opéra plutôt facile d’accès malgré son livret, mais que je n’écoute que très rarement –je l’apprécie cependant à chaque écoute, et c’est encore le cas aujourd’hui-.

La notice en ligne, ici, est plutôt complète et rend assez bien compte de la difficulté à restituer de manière cohérente ce « conte musical » doté d’un argument plutôt rocambolesque, où le fantastique, le symbolisme –le destin, la passion morbide, la mort– et la psychologie occupent beaucoup de place, de surcroît chanté en russe, une langue pour laquelle je n’ai guère de repères.

L’orchestration, en revanche, est tout-à-fait digne du plus pur Tchaïkovsky, qui s’y est toujours entendu pour faire sonner un orchestre : c’est très riche, coloré et contrasté, l’orchestre est utilisé au service de l’action, tantôt léger et brillant, tantôt beaucoup plus sombre et presque dissonant pour des scènes plus introspectives. L’orchestration et son harmonie servent à dépeindre le glissement progressif vers la folie d’Hermann.

La version du jour propose un plateau composé des stars de l’époque, dont Mstislav Rostropovich, qui délaisse ici son violoncelle pour s’emparer d’une baguette de chef d’orchestre et diriger un orchestre français et des choeurs français et russes : du fait de son énorme vibrato, ce n’est pas, et de loin, mon violoncelliste préféré malgré tout son talent et son aura médiatique ; ce n’est pas non plus, à mes oreilles, le chef d’orchestre le plus passionné/passionnant dans une oeuvre qui en demande –et en expose– pourtant beaucoup…
Son épouse à la ville, Galina Vichnevskaya, me semble un peu mûre pour jouer les oies blanches dans le rôle de Lisa. En revanche, le reste du casting est très bon, et surtout, Regina Resnik, dont l’essentiel de la carrière s’est déroulée dans les années 50, est excellente dans l’incarnation de la vieille Comtesse et constitue l’attraction principale, à mes oreilles, de cette version.
L’album, toujours disponible au catalogue de l’éditeur, est enregistré dans les studios de Radio-France à Paris et bénéfice de bonnes conditions techniques.

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Devinette « Artisanat local », la solution !

Il y a peu de temps, je vous proposais la devinette consistant à s’interroger sur le pourquoi des couvercles en étain sur les chopes de bière en Alsace.
La solution, tout-à-fait triviale j’en conviens, vous est livrée en image –cliquer pour la voir en plus grand– ci-dessous : vous vous êtes bien doutés qu’il s’agissait d’empêcher quelque-chose dans le breuvage mousseux et, en effet, c’était tout bêtement pour éviter que des cendres du tabac lentement fumé dans des pipes traditionnelles alsaciennes à tuyau assez longs et dont certaines, d’ailleurs, possèdent également un petit couvercle, ne viennent tomber dans la bière.


Une autre légende, rapportée par Marcel, explique qu’il s’agissait de lutter contre la peste transmise par les moustiques, qui, comme d’aucun ne le savait pas au Moyen-Âge, ne la transmettent pas : qu’ils étaient bêtes, les Alsaciens, en ce temps là !!!

Playlist « Valeurs sûres, désormais même en France… »

Longtemps, Anton Bruckner fut méprisé, en France, au motif que ses symphonies avaient la réputation d’être des monuments de longueur –alors qu’elles n’excèdent que rarement la durée de la neuvième symphonie de Beethoven– et d’ennui –je les trouve, pour ma part, nettement moins ennuyeuses que celle de Brahms, par exemple…-.
Justice lui fut tardivement rendue, et ce n’est que dans les années 50 qu’il commença, et grâce au disque essentiellement, à bénéficier d’une réputation à la hauteur de son génie. Il faudra encore attendre une bonne décennie pour qu’il trouve sa place dans les salles de concert françaises. Pour ma part j’ai découvert et très vite apprécié Bruckner, au sortir de l’adolescence dans les années 80, par le biais de la très bonne intégrale –au temps du LP, une intégrale en CD étant alors inaccessible financièrement…– de Günter Wand, que j’avais pu me procurer en Allemagne pour une somme en adéquation avec l’épaisseur de mon porte-monnaie de l’époque !

La playlist du jour me permet d’écouter trois symphonies parmi les plus populaires –4ème, 7ème et 9ème– du compositeur autrichien, selon trois perspectives interprétatives très dissemblables et, finalement, très complémentaires ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Parmi les premiers chefs à enregistrer des symphonies de Bruckner, William Steinberg n’est pas souvent cité, à tort selon mes oreilles ! Pourtant, dès 1956, il enregistrait pour Capitol cette 4ème symphonie « Romantique », puis, en 1963, avec le même orchestre de Pittsburgh, la 7ème symphonie, pour le label Command Classics : dans les deux cas, il propose des lectures narratives, nerveuses et incisives, en définitive pas ennuyeuses du tout ! Un peu plus tard, il enregistra avec Boston une sixième symphonie fondée sur les mêmes préceptes et se situant au même niveau d’excellence !
• Eugen Jochum poursuit une tradition interprétative bien ancrée en Allemagne depuis le début du vingtième siècle : son intégrale des symphonies du compositeur parue chez Deutsche Grammophon, dont est extraite cette septième symphonie,  fait encore référence pour certains, malgré ses instabilités de tempo au service d’une émotion de l’instant -mais avec aussi sa part de « temps morts », à mes oreilles au moins. En Angleterre, on le surnommait «Mister Stop And Go »…
Enfin, Herbert Von Karajan , considéré de son vivant par de nombreux musicographes en Angleterre et en Allemagne comme le plus grand interprète vivant de Bruckner, livre une très belle version de la neuvième symphonie « dédiée au Bon Dieu », enregistrée avec l’orchestre philharmonique de Vienne en concert en 1976 : un disque paru en édition limitée il y a déjà fort longtemps, et qui n’est plus disponible de nos jours. Une fort belle version, pleine de ferveur dans le dernier mouvement, moins puissante, mais aussi solidement architecturée que celle enregistrée à Berlin à peu près à la même époque dans le cadre d’une intégrale, encensée à peu près partout sauf en France…

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Playlist « Valeurs sûres et trésors inépuisables »

Depuis deux jours, je navigue de symphonie de Beethoven en symphonie de Beethoven au gré de ma fantaisie et de mon humeur, choisissant parmi quatre intégrales proposant des visions très différentes, mais toutes très pertinentes, abouties et complémentaires. Chacune de ces intégrales constitue une très belle réussite artistique et bénéficie de très bonnes conditions techniques, à la pointe de la technologie propre à sa date d’enregistrement.

La plus célèbre –et de très loin la plus vendue toutes époques et tous supports confondus : – est celle de Karajan : la toute première conçue et mise sur le marché en tant qu’intégrale, dans un coffret richement illustré et documenté, selon un système de souscription complètement novateur à l’époque : un pari risqué en 1963, mais totalement réussi : pour absorber les coûts, Deutsche Grammophon devait vendre au moins 100 000 coffrets, et nombreux étaient ceux qui prédisaient la faillite de la firme ; en 10 ans, un million de coffrets avaient été vendus, et les estimations de 2014, lors de la réédition en coffret CD « de luxe », tous supports confondus -LP, cassettes, CD, SACD et Blu-ray audio-, s’élèvent à plus de 15 millions de disques vendus. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

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Devinette artisanat local

Hier, en me promenant à travers la campagne, j’ai eu l’occasion d’acheter, au grand désespoir de TheCookingCat, qui, en bonne Lorraine, déteste tout ce qui touche au folklore local, deux chopes de bières alsaciennes, en poterie et avec couvercle en étain.
En Alsace, on brasse encore de nombreuses bières selon la Reinheitsgebotloi de pureté de bière édictée au 16ème siècle– et on boit la bière plutôt à température ambiante ou chambrée, la mousse doit être dense et relativement abondante, sous peine de renvoyer une bière mal tirée au motif que ce serait de la « pisse d’âne » : toute bière sans faux col un peu abondant est retournée vers son serveur !
Pendant longtemps, dans chaque Bierstub, la bière était dégustée lentement dans ces chopes en terre cuite, que l’on déposait près du Kachelofe pour la garder à bonne température : chaque chope était personnalisée afin que chacun reconnaisse la sienne. De nos jours, certaines, particulièrement ouvragées, atteignent des prix astronomiques.

La devinette du jour consiste à se demander pourquoi ces chopes étaient munies d’un couvercle en étain.

A vos claviers !

Dimanche à l’opéra : Mathis der Maler, de Paul Hindemith

C’est un opéra exigeant et somme toute assez rare qui est l’objet de ma séance lyrique dominicale : Mathis der Maler, de Paul Hindemith, opéra en 7 tableaux sur un livret du compositeur, qui s’est inspiré :
• de la Guerre des Paysans en Allemagne –Révolte des Rustauds-, qui se déroula en 1525-26 et toucha tout le Saint-Empire romain-germanique, y compris une partie de la France : Alsace –grande bataille de Saverne-, Lorraine et Franche-Comté, d’une part ;
• de l’oeuvre picturale de Matthias Grünewald±1480-1528, c’est « Mathis le peintre »-, dont on peut admirer le retable d’Issenheim qui fit sa gloire –le fait qu’il ait pu être attribué un temps à Albrecht Dürer en dit long sur sa qualité…– au Musée Unterlinden à Colmar, et inspira Hindemith, d’autre part ;
• le tout sur fond de Réforme luthérienne et de lutte contre l’église catholique.

L’oeuvre est allégorique, Paul Hindemith l’a écrite en pleine période du montée du nazisme et la situe au début de la Renaissance allemande pour mieux interroger la place et le rôle de l’artiste dans une société où montent les périls politiques.  En 1933, Adolf Hitler prend le pouvoir. Les artistes sont appelés à servir les idéaux du régime, sous peine de censure ou d’exil. La musique est surveillée par la chambre de musique du Reich (Reichsmusikkammer). Bien qu’il soit un compositeur allemand de renom, Paul Hindemith est considéré avec méfiance par le régime. Sa musique est jugée « dégénérée » (Entartete Musik) à cause de son style moderne, de ses sympathies pour les artistes juifs, et de ses prises de position humanistes.

La version du jour, enregistrée en 1977 et éditée par EMI en 1979 fut, pendant longtemps, la seule disponible. Elle est très soignée et demeure, à ce jour, sans doute la meilleure option pour aborder l’oeuvre : très bon orchestre et excellents solistes de bonne renommée, beau livret détaillé et très bonne prise de son. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-. Elle a même le bon goût de rester disponible à petit prix –en occasion– avec un livret numérique : c’est Byzance !
Mathis der Maler est divisé en sept tableaux, qui s’organisent ainsi :
1 Mathis dans son atelier : Mathis travaille sur une œuvre religieuse mais doute de son rôle d’artiste face à la souffrance du peuple. A quoi sert l’art dans un monde en crise ? Discussion avec le cardinal Albrecht, son mécène, qui veut qu’il reste fidèle à l’Église et à la tradition.
2 À Mayence, en ville : agitation populaire sur fond de famine et d’oppression féodale. Mathis rencontre Hans Schwalb, paysan révolté, et sa fille Regina. Il prend leur défense contre les soldats. Rencontre avec Ursula, fille d’un riche marchand, qui l’admire et l’aime.
3 La révolte : Mathis rejoint les révoltés malgré l’appel du cardinal à rester fidèle à l’Église. Mathis quitte la cour du cardinal. Il rejoint les paysans révoltés, porté par son désir de justice. Il se sent responsable en tant qu’homme, pas seulement comme artiste. Il renonce à son art temporairement, pour agir.
4 Le débat religieux : dialogue entre catholiques et protestants. Mathis est tiraillé. Il participe à la révolte paysanne, mais les Rustauds sont divisés entre violence et réforme. Mathis comprend vite que la violence ne mène à rien. Hans Schwalb est tué, et Regina, sa fille, traumatisée. Mathis doute à nouveau : était-ce une erreur ?
5 La répression de la révolte est sanglante. Mathis est dévasté. Ursula, soupçonnée de complicité avec les rebelles, est interrogée. Mathis intervient en sa faveur. Le dialogue entre catholiques et protestants se solde par l’impossibilité du compromis. Mathis se rend compte que les deux camps sont corrompus par le pouvoir.
6 La vision de Mathis : il s’agit d’une cène mystique, allégorique, inspirée du retable d’Issenheim. Mathis est tenté par les démons du fanatisme, de la gloire, de l’orgueil. L »apparition du Christ constitue un moment de révélation spirituelle. Il comprend que son vrai combat est intérieur, artistique.
Vision mystique : Il rêve du Christ, des anges et de la souffrance humaine – reflet du retable.
7 Le renoncement : fidèle à sa vocation initiale, Mathis renonce à la vie publique, à la lutte armée, au pouvoir. Il choisit la solitude et retourne à sa peinture. Il bénit Regina, devenue orpheline, et s’éloigne. La fin de l’opéra est calme et lumineuse : la foi dans l’art et l’humanité est restaurée.

Le style de Hindemith est parfois qualifié de « style néo-baroque » est caractérisé par son contrepoint rigoureux et sa clarté formelle. L’harmonie élargie mais la tonalité reste toujours présente. La Polyphonie est très dense, l’orchestre est très expressif, parfois dissonant mais toujours structuré. Par ailleurs, Paul Hindemith a également composé une symphonie en trois mouvements, tirés de certaines scènes de l’opéra et se référant explicitement au retable d’Issenheim et à trois de ses volets :
• le concert des anges -ouverture de l’opéra– ;
• la mise au tombeau –interlude orchestral extrait du dernier tableau, cf. cliquer sur l’imagette ci-dessous pour la voir en plus grand– ;
• la tentation de Saint Antoine –extrait du sixième tableau, cf. cliquer sur l’imagette de droite pour la voir en plus grand-.
L’accueil de cette symphonie fut excellent mais elle fut rapidement interdite par les nazis.
En définitive : un opéra majeur du vingtième siècle, et l’un de mes préférés, même s’il est peu joué, et d’un accès peu aisé -la parole prime sur l’action-. La symphonie, qui est d’accès beaucoup plus facile, ou une visite au Musée Unterlinden à Colmar pour admirer le remarquable retable d’Issenheim constituent de bonnes portes d’entrée !
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