C’est un pianiste singulier et remarquablement intéressant, quoi que fort idiosyncrasique, qui a occupé mes oreilles aujourd’hui. Et une occasion d’écouter quelques compositeurs que je ne goûte pas outre mesure –Mozart, Chopin-. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.
Ivo Pogorelich n’est pas encore très âgé, mais il a commencé à enregistrer fort jeune, suite à son échec au concours de piano « Chopin » à Varsovie. L’esclandre qui suivit la décision d’une partie du jury est restée célèbre dans les annales du monde du piano : Martha Argerich, qui voyait en ce tout jeune pianiste « un génie » démissionna avec pertes et fracas dudit jury pour contester la décision de ses pairs et Deutsche Grammophon signa le contrat réservé au lauréat au jeune éliminé.
Marié à sa professeure de piano, plus âgé que lui de 21 ans –tiens, en ces temps d’élection, cela ne vous rappelle rien ?– et portant beau, ses premiers disques furent de fracassants succès. Il enregistra assez régulièrement pendant une petite dizaine d’années, avant de se retirer, en 1996, suite au décès de sa femme.
Depuis, il est revenu sur scène, plus singulier encore qu’auparavant, mais n’enregistre plus. Cela n’empêche pas que je le situe très haut dans le panthéon personnel de mes pianistes de prédilection : une sonorité puissante et belle en toutes circonstances et des visions personnelles mais remarquablement construites.
Après une journée professionnelle démarrée plutôt calmement mais qui s’est poursuivie sur des chapeaux de roue et achevée de manière encore plus trépidante, c’est avec un certain plaisir que je m’offre une playlist courte, mais apaisante ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.
L’oeuvre est archi-connue –je vous en parlais plus longuement ici et surtout là– et fait partie de mes partitions de chevet. La présente version, dans une très belle prise de son de piano, ce qui ne gâte rien, est de grande qualité. Je vous en propose ci-dessous un extrait qui vous permettra de vous en faire une idée.
On l’ignore parfois, mais la version des « Tableaux d’une exposition » la plus fréquemment jouée et enregistrée est une transcription pour orchestre, par Maurice Ravel, de l’oeuvre originale de ModesteMoussorgsky, composée initialement pour le piano et rendant compte de sa visite au musée pour voir les dessins et toiles de son ami, le peintre Viktor Hartmann. A la mort de ce dernier, une exposition de plus de quatre cents de ses peintures fut organisée à l’Académie des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg, en février et mars 1874. La plupart des œuvres présentées à l’occasion de cette exposition sont maintenant perdues. C’est suite à la liste de cette exposition que Moussorgsky écrivit, très rapidement, sa partition.
Un bon article en ligne vous en dira plus sur la genèse et le contenu de cette oeuvre très descriptive et vous permettra même de voir les six tableaux restant de cet exposition -les autres ont disparu-. Hors le dernier tableau –La grande porte de Kiev– vraiment sonore et tapageur et que je n’aime pas beaucoup, il s’agit d’une très belle partition, facile d’accès du fait de son caractère pittoresque et très agréable à écouter.
Mais Maurice Ravel ne fut ni le premier, ni le seul, à transcrire pour orchestre cette éloquente partition. Avant lui, d’autres s‘y étaient essayés, et certains se remirent à cette tâche après la publication de sa transcription. Parmi eux, Leopold Stokowski, grand chef d’orchestre –celui qui serre la main de Mickey dans le dessin animé musical « Fantasia »de Walt Disney– et grand connaisseur des possibilités et des couleurs des instruments, dont je vous ai déjà parlé un peu précédemment : il voulut, dans sa transcription, donner un caractère plus authentiquement russe à la partition orchestrale –Ravel sonnait trop « français » pour lui-, et proposa ainsi sa propre version, laissant par ailleurs de côté deux tableaux dont il jugeait que la composition n’était pas de la main de Moussorgsky, mais procédait d’une écriture plus tardive, sans doute de Rimsky-Korsakov. Sa version, si elle ne connut pas la gloire posthume de celle de Ravel, est cependant assez fréquemment enregistrée.
Voici, en trois extraits, trois visions de l’un des tableaux : Gnomus. La musique décrit les sautillements et les grimaces d’un gnome, puis ses déplacements maladroits sur ses jambes tordues. Une écoute à bon niveau sonore permettra de mieux apprécier les différences entre les deux versions orchestrales, les transcriptions étant riches en couleurs et en détails.
Les lecteurs réguliers du blog savent mon attrait inconditionnel pour la musique d’Erik Satie, pleine d’une bizarre quiétude et fort aimable aux oreilles. Le premier disque présenté dans la playlist du jour fut l’un de mes premiers CD, je l’ai même racheté plus tard parce que je ne savais plus à qui je l’avais prêté… C’est dire si je l’apprécie !
A mon sens et malgré une prise de son un peu trop réverbérée, c’est LE plus beau des disques consacrés à cet étrange compositeur, dont je vous ai déjà parlé de manière plus complète.
Je lorgnais sur les autres disques de Pascal Rogé –pianiste français remarquable qui effectue une grande carrière loin des regards médiatiques– depuis un long moment, mais ils n’ont jamais été publiés en série économique ou regroupés au sein d’une intégrale permettant de réduire ainsi le coût de leur achat. Hors le premier, multi-réédité et qui contient les oeuvres les plus populaires d’Erik Satie, les trois autres commençaient même à atteindre des tarifs relativement indécents pour certains d’entre eux, du fait de leur rareté et de leur quasi-épuisement sans doute. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.
C’était sans compter sur les bacs à soldes allemands, où j’ai réussi à trouver le lot des trois manquants pour une somme très raisonnable, à défaut d’être totalement dérisoire. A moi donc ce qui constitue sans doute la plus belle anthologie des oeuvres pianistiques d’Erik Satie, et au sein de laquelle j’ai largement pioché ce matin : même si l’ensemble ne constitue pas à proprement parler une « intégrale », j’y ai même gagné une oeuvre que je ne connaissais pas, et qui avait échappé aux autres coffrets présents dans ma discothèque. Il s’agit, en réalité, d’une oeuvre posthume au titre toujours aussi évocateur : « Petite musique de clown triste », dont la partition a été complétée après la mort de Satie par son ami Robert Caby, et que vous pouvez écouter ci-dessous.
Comme je suis tombé du lit à une heure indécente alors que le petit jour ne pointait même pas encore –et pourtant, ici, à l’est de l’hexagone, le soleil se lève tôt…-, c’est une playlist toute en douceur et en sourdine qui accompagne depuis plusieurs heures ce début de ce qui s’annonce comme une très longue journée ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand et sur l’extrait pour en profiter un peu, vous aussi-.
Arrivé au travail, ma première occupation de la matinée sera de compléter le récépissé de retard remis hier par la SNCF : le train est arrivé 1h10 après l’horaire initialement prévu… Du coup, j’ai dû sacrifier mon déjeuner… Mais on devrait me rembourser une partie du prix du billet en échange de ce retard… A voir !
J’entame cette semaine un long périple en noir et blanc à travers la Finlande : je découvre la grande majorité des oeuvres pour piano de Jean Sibelius –je n’en connaissais qu’une petite partie– !
Les plus anciens lecteurs de ce blog savent qu’il s’agit de l’un de mes compositeurs de prédilection, essentiellement connu pour ses symphonies telluriques et son magnifique concerto pour violon, un peu moins pour la majorité de ses poèmes symphoniques ou sa musique de scène, et quasiment laissé pour compte pour ce qui concerne tout le reste de sa production : musique de chambre, musique vocale et, donc, musique pour piano qui m’intéresse ici.
J’ai eu la chance de trouver ces deux petits coffrets dans un bac à solde en Allemagne : en France, ils restent chers et sont difficiles à trouver en magasin. Ils font partie d’une entreprise éditoriale très ambitieuse.
L’ensemble de la musique pour piano de Sibelius tient donc sur 10 CD très bien remplis –ah oui quand même !-, et, dans la présente édition, l’exhaustivité est de rigueur : le moindre fragment de thème a été enregistré dans le cadre de cette intégrale copieuse. Ainsi, le premier CD –77 plages !!!– est de peu d’intérêt, puisqu’il faudra se contenter généralement de morceaux de thèmes ou d’ébauches d’idées d’une dizaine de secondes, notés ici ou là à titre mémoriel, mais aussi de pièces d’étude pas forcément très intéressantes. Mais la démarche de présenter tout le corpus pianistique de manière strictement chronologique permet cependant de suivre l’évolution du compositeur, passant de l’aimable producteur de musique de salon, inspiré par Schubert, Brahms et Tchaikovsky avec une pincée de Grieg pour le caractère nordique, au grand compositeur en quête de nouvelles recherches harmoniques –les dernières oeuvres, aux circonvolutions harmoniques étranges et belles, peuvent donner une idée de ce qu’aurait pu être sa huitième symphonie-, sur un instrument qui n’était pas son préféré -Sibelius était d’abord et avant tout violoniste-.
Je l’ai dépiauté très rapidement, sans m’attarder à ce stade. Les dernières oeuvres semblent, à mes oreilles, nettement plus attirantes et bien plus développées : transcriptions de quelques-unes de ses oeuvres pour orchestre, une sorte de traduction en noir et blanc de ses poèmes symphoniques si colorés; pages inspirées du répertoire folklorique; pièces de genre de plus grande ampleur –sans jamais atteindre à une durée très longue cependant-… Quant au pianiste Folke Gräsbeck, il est lui des coordonateurs de cette édition intégrale et réputé pour sa parfaite connaissance de l’oeuvre de Sibelius –il a par ailleurs eu le privilège d’enregistrer un album consacré à Sibelius et enregistré sur le piano et dans la maison du compositeur à Ainola– : je ne devrais pas être déçu, et, quoi qu’il en soit, les points de comparaison sont inexistants, ou excessivement rares et pas toujours facilement accessibles !
Bref, c’est toujours très agréable à écouter et rarement génial, mais l’inspiration mélodique et harmonique du compositeur semble infinie. Deux jolis coffrets à déguster patiemment, avec de nombreuses surprises en perspective ! Et un joli extrait pour que vous puissiez en profiter !
Qu’on ne s’y trompe pas, la playlist de ce jour, malgré les apparences –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-, n’est pas conçue pour porter le deuil des illusions de nos amis d’Outre-Atlantique : elle a été composée hier soir, avant de connaître les résultats des élections qui se sont déroulées là-bas !
Je concède cependant tout-à-fait volontiers que Joy Division convient parfaitement à un enterrement de première classe… Il n’empêche qu’il s’agit d’un album remarquable. Back in black, d’AC/DC, est également propice aux cérémonies de deuil et le premier album de Van Halen est peut-être bien leur meilleur –cliquer sur l’extrait musical ci-dessous pour prendre connaissance des pyrotechnies guitaristiques propres au groupe…-. A contrario, il ne faut pas revenir trop souvent à l’album consacré aux oeuvres de Philip Glass, au risque de l’indigestion et malgré le joli minois de la pianiste…
On peut être absolument original et servir la musique avec un respect scrupuleux : ce fut le cas de ce drôle de pianiste autrichien, Friedrich GULDA.
Point de chaise percée ou de mitaines à la manière de Glenn Gould, son cadet de deux ans; pas trop d’ostentation dans un jeu par ailleurs fort limpide et d’une belle technique –il remporta le premier prix au concours international de Genève en 1946, à tout juste 16 ans-; pas de prétention à l’intellectualisme alla Brendel, malgré un look au moins aussi austère en début de carrière –lunettes à larges montures et cravate en toutes occasions. Tout cela changea radicalement par la suite ! -. Simplement : servir la musique, partager la joie de jouer ensemble et ouvrir des ponts entre la musique classique « savante » et d’autres formes de musiques moins écrites a priori : Gulda, grand ami de Joe Zawinul –Weather Report, Miles Davis, Cannonball Adderley…-, fréquenta longtemps les clubs de jazz et composa plusieurs morceaux dans cette veine.
Son répertoire s’avère assez restreint : Beethoven avant tout, un peu de Mozart –plutôt le dernier Mozart-, un peu de Schubert et de Bach, des pièces isolées de Chopin, Debussy… Sa discographie est néanmoins abondante, pourtant, et complexe, puisqu’il enregistra pour de grands et petits labels, ces derniers ayant disparu ou ayant été rachetés : un véritable dédale, donc, au gré des rééditions sous licence.
C’est à Gulda que je dois ma première intégrale des sonates de Beethoven, il y a très longtemps. Un coffret de 11 33T ou pressage assez médiocre, sous son label d’origine Amadeo –une sous-branche autrichienne de Philips-. Un coffret qui reste merveilleux : il s’agit de la troisième (!!!) intégrale des sonates pour piano du compositeur, enregistrée en 1967, dans l’ordre strict de leur numérotation d’origine, comme il le fit toujours, ce qui est très rare. Un Beethoven mâle, viril, filant tout droit et sans fioriture excessive. Dans cette veine « directe » inscrite dans une tradition allemande « sans pathos » directement issue du grand Artur Schnabel, on n’a jamais fait mieux ! Diversement accueilli en France lors de sa sortie en 1968, il bénéficie désormais dans notre pays de la même aura glorieuse et légendaire qu’en Allemagne ou en Angleterre.
Ce coffret a été multi-réédité, il est désormais disponible –pour peu de temps, semble-t-il– à petit prix chez Decca, qui fut par ailleurs l’éditeur d’une autre intégrale des mêmes oeuvres par le même pianiste, enregistrée dans les années 50 –indisponible actuellement sur le marché officiel-. Enfin, le pianiste avait enregistré, à 23 ans, une intégrale des sonates de Beethoven –plus une série de variations pour piano du compositeur– pour la radio autrichienne. Ce coffret a été réédité et salué unanimement par la presse spécialisée en 2010. Il reste disponible, mais à prix relativement élevé. –Cliquer sur les imagettes pour les voir en plus grand-.
Véritable star dans son pays natal et en Allemagne, Gulda organisa sa propre mort –fictive– par communiqué de presse, pour mieux ressusciter en concert !
C’est d’ailleurs lors de quelques concerts mythiques avec l’orchestre philharmonique de Münich que sa réputation de joyeux fêtard de la musique fut définitivement établie. La vidéo ci-dessous est tout-à-fait révélatrice de cette joie communicative –les musiciens de l’orchestre de Celibidache en train de sourire, qui l’eût cru ? -. Gulda, avec son bonnet et en pantalon de survêtement, semble diriger à peu près n’importe comment depuis son piano et se perdre dans sa partition de poche, mais la version de ce cinquième concerto de Beethoven est à connaître absolument : le second mouvement –début à 20:45-, notamment, est tout-à-fait magnifique ! L’échange avec les musiciens de l’orchestre est constant et bienveillant –ça devait les changer du vieux grincheux pansu 😉 -.
Riche et célèbre bien que peu connu dans nos contrées, Friedrich Gulda est mort en 2000.
La playlist de ce jour commence tout en élégance et en finesse. Ce ne sont pas nécessairement les qualificatifs qui viennent le plus spontanément pour définir la musique de Bach, en général, mais, pour le coup, cette magnifique version en est largement doté. Un des plus beaux disque consacré aux compositeur ces dernières années, assurément. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand et sur l’extrait musical pour en profiter un peu-.
Vous en trouverez une très belle chronique sur ce blog, l’un des plus beaux graphiquement –la cohérence typographique est totale avec le contenu du propos-, et remarquablement documenté et illustré de surcroît.
Son propriétaire me dirait par ailleurs que les sonates de Scarlatti au piano –il en a composé au moins 555 !-, c’est mal, mais je trouve pour ma part que l’instrument leur sied à ravir, et je les écoute essentiellement de cette manière plutôt qu’au clavecin, dont le son fut justement comparé à celui de « squelettes copulant sur un toit en tôle ondulée » par le chef anglais Thomas Beecham, qui ne manquait pas d’humour –anglais– et n’y connaissait pas grand-chose en la matière –on a fait beaucoup de progrès depuis la »renaissance baroque » mais les clavecins de son époque étaient en effet assez cinquants-.
C’est ensuite du « très grand piano » virtuose et brillant qui m’attendra avec Liszt, dans des interprétations qui défrayèrent la chronique au début des années 80, avant de passer à un tout autre genre, même si, par la suite, JoeJackson s’est tournée vers la musique classique. Mais son deuxième album est d’une vraie énergie presque punk, tout en proposant de fort jolies mélodies !
En attendant la petite cérémonie d’intronisation dans un nouveau demi-siècle de ce soir, voilà de quoi commencer cette entrée dignement ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.
Ma journée d’hier fut essentiellement rythmée par les concerts de Sviatoslav Richter à Carnegie Hall en 1960, date de sa première visite aux Etats-Unis, dont il rentra fort déprimé –le monsieur avait un tempérament complexe-, la lecture du début de ce formidable livre sur la guerre civile aux Etats-Unis entre 1961 et 1965 –je ne l’avais plus depuis des lustres et je le lorgnais depuis longtemps– et la dégustation de ce magnifique breuvage !