Playlist « Bons pour l’asile ! »

La playlist de ce jour est consacrée à trois musiciens bons pour l’asile psychiatrique : c’est d’ailleurs là qu’ils ont, chacun, fini leur vie, dans un dénuement social à peu près complet. La musique, sans laquelle la vie serait une erreur selon Friedrich Nietzsche, adoucit les moeurs, mais elle peut aussi rendre fou, semblé-t-il ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

• Robert Schumann – Symphonie n°4
Orchestre philharmonique de Berlin, Rafael Kubelik – 1963 ****

Robert Schumann mourut à l’asile psychiatrique d’Endenich, près de Bonn, en 1856. Peut-être atteint de neurosyphillis –diagnostic remis en cause de nos jours-, il passa les deux dernières années de sa vie à se laisser mourir à petit feu dans cette institution, dont, malgré l’avis des médecins et de ses amis, sa femme Clara, avec laquelle les relations s’étaient progressivement détériorées, ne voulut jamais qu’il ressorte : elle ne lui rendit visite qu’une seule fois, quelques jours avant le décès du musicien…
De santé très fragile, pianiste et chef d’orchestre raté, il composa, outre son merveilleux corpus pour piano, quatre symphonies dont l’orchestration est souvent jugée maladroite, ou pour le moins manquant de couleurs, mais d’une belle veine mélodique, et dont je préfère très largement la quatrième. Rafael Kubelik enregistra deux intégrales des symphonies de Schumann, au début des années 60, puis au milieu des années 70.

• Friedrich Nietzsche – Musique pour piano
Jeroen van Veen – 2016 ***

Friedrich Nietzsche, sans doute atteint lui aussi de neurosyphillis, végéta durant les onze dernières années de sa vie dans la maison de sa mère, puis de sa soeur, où il mourut, après être passé par les asiles psychiatriques de Bâle puis d’Iéna. Mort-vivant à partir de 1889, il détestait sa soeur, anti-sémite notoire, qui contribua largement à sa récupération par le régime national-socialiste.
Nietzsche, philologue-philosophe qui avait tué dieu et considérait que les Juifs étaient le plus grand peuple de l’histoire, écrivait dans une langue remarquable. Critique musical ami/ennemi de Wagner et qui admirait profondément « Carmen », de Bizet, il composa également quelques très jolies, à défaut d’être géniales, pièces pour piano, fort peu enregistrées.

• Hans Rott – Symphonie n°1 – Suite pour orchestre
Orch. Symph. Radio de Francfort, Paavo Järvi – 2010 *****

 » Un musicien de génie … qui est mort non reconnu et dans le besoin au seuil même de sa carrière. On ne peut pas mesurer ce que la musique a perdu en lui. Telle est la hauteur à laquelle son génie s’élève dans sa symphonie, qu’il a écrite alors qu’il avait 20 ans et qui fait de lui le fondateur de la Nouvelle Symphonie comme je l’envisage « . C’est ainsi que s’exprimait Gustav Mahler au sujet de Hans Rottcliquer sur son unique portrait réalisé de son vivant connu pour le voir en plus grand-, foudroyé à 22 ans par une forme de folie hallucinatoire –il avait notamment menacé un passager avec un revolver lors d’un voyage en train, affirmant que Brahms avait rempli le train de dynamite pour le faire sauter…– et des symptômes maniaco-dépressifs dont il ne se remit jamais et qui contribuèrent à son enfermement en asile psychiatrique à Vienne pour les dernières années de sa courte vie -il est mort à 25 ans-.
Au contraire de Mahler, Brahms n’avait pas apprécié outre mesure l’unique symphonie de Rott, la jugeant à la fois belle et maladroite. Redécouverte dans les années 80, sa publication en CD fit l’effet d’une petite bombe, dont le souffle est assez rapidement retombé. Cette symphonie est en effet à la fois riche en très belles choses, mais passablement décousue. La version de Paavo Järvi est la meilleure que je connaisse de cette oeuvre, plusieurs fois enregistrée depuis sa redécouverte.

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Playlist « Schumann et les Grands Anciens »

Dans cette playlist, quelques pièces pour le piano –l’oeuvre pour piano de Schumann est globalement magnifique et côtoie les plus hauts sommets de la littérature pour l’instrument– sont interprétées par de « Grands Anciens », dont les précieux témoignages sont préservés grâce au disque. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-. Une notule qui comporte même un extrait !

• Carnaval – Claudio Arrau – 1967 *****

L’anthologie consacrée à Robert Schumann qu’enregistra entre 1967 et 1976 le pianiste chilien Claudio Arrau pour Philips reste, à mon avis, incontournable, et constitue un très bon moyen de découvrir les oeuvres pianistiques du compositeur : tous ces enregistrements furent réunis en un coffret de 7 CD édité à l’origine par Philips, qui offrait régulièrement de très belles prises de son, charnues et profondes, au pianiste, dans le cadre de sa remarquable Arrau Edition, malheureusement indisponible depuis des lustres…

• Waldszenen – Wilhelm Kempff – 1974 ***

A contrario, l’anthologie enregistrée par Wilhelm Kempff à peu près à la même époque pour le label Deutsche Grammophon par Wilhelm Kempff est beaucoup plus inégale. Le pianiste, né dix ans avant Arrau, avait près de 80 ans au moment de sa réalisation, et ses doigts répondent parfois difficilement aux exigences de ces partitioons. Les Waldszenen font partie des pièces les plus réussies –mais les « Études symphoniques », par exemple, sont à éviter-. De très nombreux disques de Wilhelm Kempff souffrent souvent de prises de son assez métalliques et manquant de graves, alors que son éditeur savait réaliser d’excellentes prises de son de piano depuis longtemps…

• Etudes symphoniques – Emil Gilels – 1984 *****

L’enregistrement, live, fut réalisé lors de l’un des tout deniers concerts d’Emil Gilels, en septembre 1984 à Locarno, en Suisse. Les « Études symphoniques » de Schumann constituaient la dernière oeuvre de ce concert, qui comprenaient également quelques sonates pour piano de Scarlatti en entrée, suivies de « Pour elle piano » de Debussy. Gilels enregistra assez peu de Schumann durant sa carrière, mais il y excellait cependant, et ces études symphoniques sont absolument superbes !

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Playlist douce et intime

Trois très beaux albums de musique pour piano à écouter paisiblement au coin du feu… –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

• Federico Mompou – Musica Callada, cahiers 1 à 4
Federico Mompou, Piano – 1974 *****

Federico Mompou, compositeur espagnol né en 1893 et mort en 1987, enregistra une anthologie de ses oeuvres pour le piano en 1974 pour le label espagnol aujourd’hui disparu Ensayo. Ces enregistrements ont été repris sous licence par l’éditeur Brilliant, qui les a publiés dans un coffret de 4 disques, qui ne semble malheureusement plus disponible à l’heure actuelle. Ces 28 miniatures de « Musique silencieuse » sont réparties en quatre cahiers, composés entre 1959 et 1967 et sont d’une grande concision, qui n’exclut pas une belle expressivité, très dépouillée, et une grande quiétude. Le compositeur les considérait comme sa plus grande réussite.

• Edvard Grieg – Pièces lyriques, sélection de 20 pièces
Emil Gilels, piano – 1974 *****

Cet album fut et reste encensé par la presse spécialisée du monde entier –et même en France-, depuis sa parution. Emil Gilels adorait ces pièces très intimistes et il dut beaucoup insister auprès de son éditeur pour pouvoir les enregistrer : à raison, puisque le disque se vendit très bien ! Dans cet album, qu’il mit un soin maniaque à enregistrer, demandant notamment aux ingénieurs du son de déplacer / repositionner les micros en fonction des caractéristiques de chaque pièce, il en révèle les multiples beautés grâce à son toucher d’une infinie délicatesse, qu’on n’aurait pas soupçonnée chez ce titan du piano !

• Erik Satie – Gymnopédies et autres pièces pour piano
Pascal Rogé – 1984 *****

Autre très beau disque anthologique d’un compositeur à la fois espiègle et pudique, ayant vécu toute une partie de sa vie dans une misère extrême, qu’il dissimulait derrière ses jeux de mots et ses attitudes de dandy. S’il ne fallait qu’un seul disque de Satie dans une discothèque –ce qui serait fort dommage à mon avis-, c’est assurément celui-ci que je choisirais. Pascal Rogé a enregistré chez Decca trois albums complémentaires des compositeur, qui sont actuellement difficilement disponibles, ce qui doit former l’intégrale –ou quasi-intégrale– la plus séduisante à mes oreilles.

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Playlist « Souvent Beethoven varie ! »

Les 32 sonates pour piano de Beethoven représentent une conception nouvelle de l’écriture pianistique : elles constituent la pierre angulaire de l’histoire de la musique pour piano et leur importance ne saurait être surestimée. Mais le compositeur composa de très nombreuses autres pièces pour le piano, dont de nombreuses séries de variations, tout au long de sa vie. L’intégralité de ces variations constitue la playlist de ces deux derniers jours. Pour la plus grande partie, cette playlist est tirée du coffret-anniversaire intégral édité en 2020 pour les 250 ans de sa naissance, que j’avais présenté ici. Je l’ai simplement complétée, pour les 32 variations WoO 80, par la fabuleuse version live d’Emil Gilels, enregistrée en 1968 à Moscou.-Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Nombre de ces variations ne font pas partie du corpus officiel de ses oeuvres publiées. Elles sont répertoriées dans le catalogue WoO –Werke orne Opuszahle– ou dans le plus tardif catalogue Hess, et certaines ont été composées lorsqu’il était encore adolescent, mais même ces « petites pièces » sont souvent remarquablement intéressantes et permettent de mieux comprendre la réputation de Beethoven-pianiste-improvisateur qui était la sienne de son vivant, avant qu’il ne devienne sourd : au fur et à mesure du déclin progressif de son audition, il se plaignait régulièrement que ses pianos, même les plus performants de l’époque, ne produisent pas un niveau sonore suffisant…
Quant aux quatre séries  inscrites au répertoire officiel du compositeur, elle sont tout-à-fait remarquables et n’ont rien à envier aux sonates qui leur sont contemporaines.

Liste exhaustive de l’ensemble des variations pour piano de Beethoven –beaucoup plus complète que celle de l’encyclopédie en ligne française, assez lacunaire !!!.
• 9 variations sur une marche E.C. Dressler en ut mineur, WoO 63
• 6 variations sur une chanson suisse en fa majeur WoO64
• 24 variations sur l’air « Veni amore » de Righini en ut majeur WoO 65
• 13 variations sur « Es war einmal alter Mann » de Dittersdorf en la majeur WoO 66
• 8 variations pour piano à 4 mains sur un thème du comte Waldstein en ut majeur WoO 67
• 12 variations sur le « Menuetto a la Vigano » de J. Haibel en ut majeur WoWo 68
• 9 variations sur un thème de Paisiello ‘Quant’e piu bello » WoO69
• 6 variations en sol majeur sur « Nel cor più non mi sento » de Paisiello, WoO 70
• 12 variations sur une danse russe du ballet de P. Wranitsky « Das Waldmädchen » WoO 71
• 8 variations sur une romance Grétry « Une fièvre brûlante » en ut majeur WoO 72
• 10 variations sur le duo « La stessa, la stessissima » de Salieri en si bémol majeur WoO 73
• 6 variations pour piano à 4 mains sur le lied « Ich denke dein » en ré majeur WoO74
• 7 variations sur « Kind, willst du ruhig schlafen » de Winter en fa majeur WoO 75
• 8 variations sur un tri de Sussmayer « Tandeln und Scherzen » en fa majeur WoO 76
• 6 variations faciles sur un thème original en sol majeur WoO 77
• 7 variations en ut majeur sur « God save the King », WoO 78
• 5 variations en ré majeur sur « Rule Britannia », WoO 79
• 32 variations en ut mineur sur un thème original, WoO 80
• Thème et variation en si bémol majeur « Zur Übung der Faust » Hess 99
• Thème et variation en la majeur Hess 72
• 6 variations en fa majeur, op. 34
• 15 variations et 1 fugue « Eroica » en mi bémol majeur, op. 35
• 6 variations en ré majeur sur un thème original op.76
• 33 variations en ut majeur sur une valse de Diabelli, op. 120

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Playlist « Viva España »

Une playlist très agréable, selon un répertoire espagnol que je maîtrise assez mal, et pleine de soleil pour réchauffer l’air ambiant : les températures matinales sont tout-à-coup très fraîches, depuis ces derniers jours ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

• Manuel de Falla – L’amour sorcier ; Danses du « Tricorne »
Grace Bumbry – Orchestre RIAS de Berlin, Lorin Maazel – 1965 ***

• Enrique Granados – Goyescas
• Isaac Albeniz – Iberia
Artur Pizarro, piano – 2010 ****

• Joaquin Rodriguez – Concierto de Aranjuez
Narciso Yepes, guitare – Orch. symph. RTV espagnole, Odon Alonso – 1969 ****

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Playlist « Le diable au cheveux rouges »

La victoire d’Emil Gilels, à 16 ans, lors du tout premier concours de piano de l’ensemble des fédérations de l’Union soviétique à l’unanimité des membres du jury, attira sur lui l’attention de Staline, qui le surnomma « Mon diable aux cheveux rouges », du fait de sa virtuosité phénoménale et de sa chevelure flamboyante.

Quelques années plus tard, à peine âgé de 20 ans, Emil Gilels triompha au premier concours international de la reine Elisabeth, malgré l’hostilité marquée que lui vouait son professeur Heinrich Neuhaus, qui lui préférait un autre élève, Sviatoslav Richter. Pourtant, Gilels, qui avoua plus tard ne pas avoir appris beaucoup de Neuhaus, ne lui en tint jamais rigueur. Durant la guerre, Emil Gilels fit partie de la résisance civile et joua tant dans les hôpitaux que sur le front. Alors qu’il avait toujours refusé toute faveur personnelle, il intercéda personnellement auprès de Staline, en 1941, pour faire libérer Neuhaus de prison alors que celui-ci était soupçonné d’accointances avec l’Allemagne nazie, puis pour lui permettre de trouver un piste de professeur lorsqu’il fut exilé à Sverldovsk, entre Oural et Sibérie .

La playlist de ce jour est consacré à des enregistrements d’avant l’évolution d’Emil Gilels vers le style plus décanté qui marquera ses quinze dernières années. Ces enregistrements live sont tous d’origine soviétique, mais Gilels, bardé de décorations et de médailles qu’il ne porta jamais –Prix Staline, Prix Lénine, Artiste du peuple de l’Union soviétique…– fut le premier artiste autorisé à se produire « à l’ouest », sévèrement chaperonné par des agents du KGB cependant, où il enregistra quelques disques pour RCA –et, beaucoup plus tard, pour EMI et Deutsche Grammophon-. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

• Johann Sebastian Bach – Partita n°1 BWV 825 – Suite française n°5 BWV 816 – Fantaisie chromatique et fugue BWV 903 – 1950, 1959 et 1948 *****

Emil Gilels ne joua jamais beaucoup de pièces pour clavier de Bach, mais il fut souverain dans toutes celles qu’il interpréta –souvent dans des transcriptions de Busoni ou de Siloti-, sans rechercher une quelconque authenticité historique, ni livrer d’interprétations outrageusement romantiques. Le travail sur la sonorité est exemplaire, de même que l’utilisation des pédales.

• Ludwig Van Beethoven – Sonates pour piano n°3, 23 et 27 – 1952, 1961 et 1957 *****

Emil Gilels fut, dès sa prime jeunesse, un interprète exceptionnel des sonates de Beethoven, ce dont témoigne sa fabuleuse quasi-intégrale pour Deutsche Grammophon, enregistrée tout au long des années 70 et 80 –jusqu’à son décès en 1985-. Le mouvement lent de la troisième sonate, ici, est merveilleux de retenue et la sonorité est somptueuse. Dans la 23ème sonate « Appassionata », il donne libre court à tous les contrastes dynamiques dans le premier mouvement, le deuxième mouvement chante superbement puis Gilels est déchaîné dans le mouvement final –sans la reprise-, qu’il dynamite furieusement !

• Liszt – Sonate en si mineur ; Chopin – Sonate pour piano n°2 – 1961 *****

Il existe de très nombreuses versions en concert de la sonate de Liszt par Gilels, qui propose une vision dense, très tendue et assez sombre de l’oeuvre, parfois cataclysmique mais pourtant sensible, sans être sentimentale. Tous ses enregistrements font partie des grandes versions d’une oeuvre qu’il joua tout au long de sa carrière. Emil Sauer, élève de Liszt, avait affirmé un jour, entendant Emil Gilels : «Je n’ai rien entendu de semblable depuis la mort de mon Maître». La sonate de Chopin, notamment connue pour sa fameuse « marche funèbre », est à la fois délicate et intense, superbe de sonorité.

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Playlist « Goldberg dans tous ses états »

Mes nuits sans dormir, le retour… Tant qu’à pratiquer l’insomnie comme un art de vivre, autant aller au bout de cette démarche et, donc, faire comme le comte Von Keyserlingk, insomniaque qui écoutait ces variations écrites pour peupler ses nuits : une légende bien établie raconte qu’il se les faisait jouer au clavecin chaque nuit par un élève de Bach, Johann Goldberg.

Ce qui n’est pas une légende, c’est que l’exemplaire personnel de la partition publiée du compositeur fut retrouvée en 1974 à Strasbourg et qu’elle comprend à la fois des corrections et de la musique supplémentaire : 14 canons sur les nuits premières notes de l’aria. Pour la petite anecdote, le treizième des ces canons est reproduit sur la partition que le compositeur tient en main dans le très célèbre portrait peint par Elias Haussmann en 1746 –cliquer sur l’imagette de gauche pour la voir en plus grand-.

Pour cette playlist nocturne, j’’ai écouté trois propositions différentes de ces variations –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– :

• une version pour clavecin, enregistrée par Trevor Pinnock en 1980, claire, vive et énergique, extrêmement bien articulée rythmiquement ! L’une des toutes meilleures propositions de cette oeuvre au clavecin. *****
• une version transcrite pour trio à cordes, arrangée par le violoncelliste Misha Maisky et enregistrée en 2007, qui apporte forcément des couleurs très différentes à une oeuvre spécifiquement écrite pour le clavecin. ****
• une version pour piano enregistrée par Alexis Weissenberg à Paris en 1982, au début de l’ère digitale. J’aime beaucoup cette version précise et virtuose, la sécheresse du jeu du pianiste étant à mes oreilles parfaitement adaptée à cette oeuvre. ****

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Playlist « A l’Américaine » – 3. Chicago, New York, Philadelphie – Van Cliburn

Mon périple sur la côte est des États-Unis s’achève avec cette playlist, consacrée au jeune pianiste Harvey Lavan Cliburn, plus connu sous son nom d’artiste : Van Cliburn.

Le pianiste interprète dans cette playlist toute une série de concerto du grand répertoire –Schumann, Grieg, Liszt et Rachmaninov-. Il est accompagné par trois des des orchestres du « Big Five » :
celui de Chicago sous la direction de Fritz Reiner –d’origine hongroise comme Szell et doté d’un caractère de cochon, sans doute le pire de tous les tyrans de podium– ;
celui de New York, renommé pour l’occasion « Symphony Of The Air » pour des questions d’ordre juridique,  sous la direction de Kirill Kondrashin –en tournée aux États-Unis– ;
celui de Philadelphie enfin, très réputé pour sa splendeur sonore, sous la direction d’Eugène Ormandy –autre hongrois, à croire que toute la Hongrie avait migré en Amérique au début du vingtième siècle !-. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Van Cliburn était auréolé de prestige pour avoir remporté le premier prix du concours Tchaïkovsky à Moscou en 1958, pendant la « guerre froide » donc, et le président du jury, rien moins qu’Emil Gilels, dut intervenir auprès de Krouchtchev pour justifier sa victoire. Il enregistra avec beaucoup de succès, durant quelques années au détour des années 60, de très nombreux concertos, accompagné par les meilleurs orchestres et chefs des États-Unis, avant de disparaître progressivement des radars durant les années 70. Chacun de ses albums, qui bénéficie du savoir-faire technique de RCA à l’époque, mérite son pesant de **** ou ***** !

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Playlist « A l’Américaine » – 2. Cleveland – Szell & Fleisher

Continuant sur la lancée de ma tournée des orchestres et artistes américains, je suis arrivé pour cette playlist à Cleveland, où, sous la direction du chef hongrois naturalisé américain George Szell, l’orchestre fit rapidement son entrée dans le cercle très restreint des « Big Five » –les cinq meilleurs orchestres du pays : Boston, Chicago, Cleveland, New York et Philadelphie-. Comme son collègue Fritz Reiner, George Szell, inscrit dans la tradition des « chefs objectifs », était réputé pour son exigence et son intransigeance. Un tyran de la baguette, donc, même s’il semble qu’il ait été d’un caractère un peu moins épouvantable que Fritz Reiner.

Entre 1958 et 1963, il entama une collaboration fructueuse avec le jeune pianiste Leon Fleisher –élève d’Artur Schnabel et vainqueur, comme Emil Gilels, du prestigieux concours de la Reine Élisabeth en 1952-, qui donna lieu à quelques enregistrements de concertos pour piano qui demeurent, aujourd’hui encore, des monuments discographiques, et constituent ce que chacun de ces deux artistes a fait de mieux dans ces oeuvres : Leon Fleisher est un pianiste bien plus assuré que Clifford Curzon pour accompagner Szell dans le premier concerto de Brahms et George Szell est beaucoup moins raide avec son jeune collègue qu’il ne le sera, à la fin de sa vie, avec Emil Gilels.

Les pressages CBS de l’époque, relativement médiocres, surtout pour les LP parus en séries économiques, n’ont jamais rendu justice à la qualité technique très honorable de ces enregistrements ; leur réédition en CD a permis de les redécouvrir dans de bien meilleures conditions. Curieusement, il me semble qu’aucun coffret à petit prix –les jolies rééditions Sony-CBS– n’a jamais réuni l’ensemble des concertos enregistrés par ces artistes, et qui doit représenter en tout et pour tout 7 CD. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.


C’est la maladie de Leon Fleisher, atteint très tôt d’une paralysie de la main droite, qui mit malheureusement un terme à cette collaboration : le pianiste dut alors se résoudre à l’enseignement et, partiellement rétabli, ne fit son come-back qu’au détour des années 2000, mais sa carrière était déjà derrière lui.

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Playlist « À la découverte de quelques raretés de Claude Debussy »

Il fait si chaud –36° prévus aujourd’hui–  que, hors de courtes promenades très matinales ou très crépusculaires, il est plus agréable de rester cloîtré à la maison –où je réussis à maintenir une température raisonnable de 26 à 27°, l’appartement étant traversant et permettant une bonne circulation de l’air– et d’en profiter pour explorer quelques trouvailles au sein de ma discothèque, que je n’avais pas encore écoutées, et qui constituent de vraies raretés, voire une authentique découverte.
C’est le cas avec trois oeuvres de Claude Debussy, extraites du coffret de l’intégralité de ses oeuvres, que je vous présentais rapidement ici, il y a presque un an. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.


On trouvera donc dans cette playlist :

• Première suite pour orchestre – Orch. Les Siècles, François-Xavier Roth – 2013 ***

La première suite pour orchestre est une oeuvre de jeunesse de Debussy, composée vraisemblablement entre 1882 et 1884, au moment où il commençait à exercer à écrire des pièces orchestrales dans le cadre de ses études en classe de composition au conservatoire de Paris. Lorsqu’il soumit au jury de fin d’étude le deuxième mouvement de cette suite, ledit jury constata que le musicien « écrivait mal la musique mais avait cependant fait des progrès ». Nonobstant ces considérations peu engageantes, il s’agit d’une musique toujours très agréable à défaut d’être très originale, mais qui n’annonce pas réellement les futures réussites orchestrales du compositeur que sont le « Prélude à l’après-midi d’un faune » ou « La mer ». L’enregistrement, de très belle qualité technique, est une « première mondiale ». Le disque original comporte également une version assez réussie de « La mer », à laquelle je préfère néanmoins plusieurs autres propositions.

• Fantaisie pour piano et orchestre, version « définitive » de 1910 – François-René Duchâble, piano ;
Orch. Du Capitole de Toulouse, Michel Plasson – 1995 ***

Debussy, peu satisfait de son oeuvre, la désavoua et n’autorisa jamais de son vivant qu’on l’interprète ; ainsi, elle ne fut créée qu’en 1919, un an après son décès. Il retravailla sa partition, dont la première version remonte à 1889, au moins jusqu’en 1910. La version de François-René Duchâble, remarquable pianiste très virtuose qu’il est malheureusement de bon ton de dénigrer en France est de très belle tenue, même si la prise de son semble est tout juste convenable eu égard à sa date.

• Marche écossaise sur un thème populaire – Orch. National de l’ORTF, Jean Martinon – 1973 ***

Le titre exact de cette courte oeuvre pour orchestre, publiée en 1891, est « Marche écossaise sur un thème populaire, ou Marche des anciens Comtes de Ross, dédiée à leur descendant le Général Meredith Reid, grand-croix de l’ordre royal du Rédempteur ». Excusez du peu ! Et, je vous assure : la chaleur ne m’est pas montée à la tête !
Outre cette version pour orchestre, Debussy avait à l’origine composé cette oeuvre pour piano à quatre mains. Il en existe également une transposition pour piano à deux mains de la version pour orchestre ! Comprenne qui pourra ! Au demeurant, l’oeuvre est très agréable et cette version est très bien !

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