Playlist « Beethoven à la mode soviétique »

Entamée avant l’aube, la playlist du jour propose trois pianistes russes, et pas n’importe lesquels, dans un programme consacré intégralement à des sonates de Beethoven. Les pianistes sont Heinrich Neuhaus, Sviatoslav Richter et Emil Gilels, les deux derniers étant enregistrés en concert. Quant aux sonates écoutées, il s’agit des n°3, 9, 12, 14, 24, 29, 30 et 31. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Les enregistrements d’Heinrich Neuhaus sont difficiles à dater, le disque est issu d’un coffret « grands pianistes russes » parus chez en 1986 chez Harmonia Mundi, éditeur français aujourd’hui disparu, qui publiait à cette occasion des enregistrements Melodiya : d’après mes rapides recherches, ces sonates auraient été enregistrées entre 1947 et 1950. Heinrich Neuhaus fut le professeur aussi bien de Gilels –les deux hommes ne s’appréciaient pas, Gilels affirme n’avoir quasiment rien appris de lui, d’autant qu’il avait déjà remporté à l’unanimité le premier prix lors du concours de l’Union– que de Richter, son élève « chouchou ». Etonnamment, il eut la vie sauve durant la guerre, alors qu’il était emprisonné à la Loubianka, grâce à l’intervention personnelle de Gilels directement auprès de Staline. Remarquable pédagogue et interprète, il donne à entendre quatre excellentes versions de ces sonates, dans un son très convenable.

Considéré comme l’un des très grands pianistes du vingtième siècle, Sviatoslav Richter a été autorisé à effectuer des tournées en Occident et aux Etats-Unis à partir de 1960. Il y effectua quelques enregistrements, dont les sonates écoutées ce jour. A mes oreilles, le Beethoven de Richter est très inégal –variable du bon à l’exceptionnel-, et largement tributaire me semble-t-il de l’humeur du jour –le pianiste était d’une personnalité plutôt complexe et parfois assez peu amène-. Pour ces trois sonates, qui ne sont pas les plus connues, il semble être dans un très bon jour.
Enfin, les lecteurs réguliers de ce blog savent que les sonates pour pianode Beethoven par Emil Gilels constituent pour moi le sommet de la discographie de ces oeuvres, bien que son décès prématuré nous prive d’une intégrale complète –indisponible à l’heure actuelle, mais elle ne semble pas supprimée par l’éditeur– . Ici, en concert, il livre une « Hammerklavier » à l’abattage considérable, et dont le troisième mouvement est d’une beauté à couper le souffle. Un très grand disque, qui vient clore une superbe playlist !

Playlist « Grands oubliés »

La playlist de ce jour présente de grands artistes restés dans l’ombre durant leur une partie de leur carrière et presqu’oubliés de nos jours, mais suscitant encore l’intérêt et l’admiration d’un petit cercle de mélomanes. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Maria Grinberg -1908-1978- était une pianiste russe, à peu près de la génération d’Emil Gilels ou Sviatoslav Richter. Elle fut victime des cruautés du régime stalinien –son père et son mari furent exécutés durant les purges staliniennes– et relégués à des tâches obscures comme timbaliers ou pianiste accompagnatrice, avant d’être enfin autorisée à reprendre ses activités de soliste –essentiellement à travers toute l’URSS– et d’enseignante. Son intégrale des sonates pour piano de Beethoven fut enregistrée entre 1961 et 1974 et éditée par le label Melodiya, mal pressée sur des 33 tour médiocres et sporadiquement importée en Europe occidentale, où elle passa totalement inaperçue.
Lors de sa réédition en CD, j’avais demandé au disquaire allemand qui m’approvisionnait régulièrement en disques rares, de me la procurer, et son commentaire, lui qui en prodiguait rarement, fut assez lapidaire : « C’est très inégal et très contestable (ganz anfechtbar) ». Saluée par la presse spécialisée française, critiquée de manière plus nuancée en Angleterre et surtout en Allemagne, cette intégrale contient de superbes moments et propose une vision violente, parfois trop, et abrupte, parfois trop, des sonates de Beethoven, sur des pianos souvent de piètre qualité et passablement enregistrés. De larges extraits de cette intégrale sont disponibles ici.

Schmuel Ashkenasi (1941-…) est un violoniste israélien, finaliste du concours de la Reine Elisabeth et 2ème prix du concours Tchaïkovsky, ce qui situe son exceptionnel niveau ! En tant que soliste, je n’ai, dans ma discothèque, que ce fabuleux enregistrement, en 1969, des deux premiers concerto pour violon de Paganini, où il brille de mille feux dans des oeuvres conçues dans cet esprit. Vous pouvez l’écouter en ligne ici.
Concernant le deuxième concerto, je n’ai jamais entendu mieux que cette version. Je n’ai jamais trouvé d’autres enregistrement où il joue en tant que soliste –il existe au moins, chez Deutsche Grammophon, un enregistrement des romances pour violon de Beethoven couplées avec un concerto de Mozart-. Malgré tout son talent, il semble qu’il n’ait jamais réellement ou durablement fait carrière en tant que soliste. En revanche, il a beaucoup enregistré en tant que premier violon du quatuor Vermeer, qu’il fonda en 1969, et il enseigne dans les plus grandes écoles des États-Unis.

Je vous ai déjà parlé il y a quelques temps de Gina Bachauer (1913-1976), qui est peut-être bien la première pianiste que j’ai découverte –sans le savoir-, mon père écoutant très souvent le 5ème concerto pour piano de Beethoven dans la version –un peu oubliée mais excellente– que je vous présentais dans cette précédente notule. Pianiste née grecque et naturalisée britannique, elle fut célébrée comme « la reine des pianistes » durant sa carrière et couverte de gloire et d’honneurs en Angleterre et aux États-Unis. Elle eut notamment la chance de pouvoir enregistrer sur un grand label réputé pour la qualité de ses prises de son, avec de très bons orchestres et des chefs réputés ou en devenir.

Le disque de ce jour, consacré au 4ème concerto pour piano de Beethoven, est moins bon que celui proposant le cinquième concerto, du fait notamment d’un accompagnement orchestral assez routinier et manquant de poésie –étonnamment, Dorati, très bon chef en général, semble assez peu à l’aise avec Beethoven : la réédition récente de l’enregistrement intégral des symphonies est très décevante à mes oreilles-. Le meilleur moment de cet enregistrement est la très belle cadence du premier mouvement, à découvrir ici. De façon surprenante eu égard à son notoriété très bien établie durant sa carrière, ses disques ont été très tardivement réédités et elle est tombée dans un relatif oubli après son décès.

Playlist « Chevaux de bataille »

La playlist du jour est consacré à un artiste souvent rencontré dans les pages de ce blog, puisqu’il s’agit d’Emil Gilels, mon pianiste favori, ici à l’oeuvre dans quelques concertos, dont certains constituèrent des chevaux de bataille tout au long de sa carrière, et notamment le rare deuxième concerto pour piano de Tchaïkovsky –dans l’édition révisée par Siloti-. A contrario, la version du jour du premier concerto du même compositeur n’est pas la meilleure que je connais des –au moins– 17 versions, officielles ou non, de cette oeuvre par le pianiste. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Pour reprendre l’appréciation de la revue Gramophone à l’occasion de la réédition chez Warner des trois concertos pour piano de Tchaïkovsky, « tout disque d’Emil Gilels est un événement de première ampleur, où ce lion du clavier offre l’art de la plus haute intégrité ». Inutile d’en dire plus…

Playlist « Totale découverte »

La playlist de ce jour est consacrée à des oeuvres qui m’étaient jusqu’à présent inconnues, au moins sous cette forme. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

La musique pour deux pianos ou piano à quatre main de Maurice Ravel est en effet essentiellement composée de transcriptions, et parfois d’esquisses, de ses propres oeuvres orchestrales, sauf pour ce qui concerne le « Prélude à l’après-midi d’un faune », de Debussy, transcrit pour piano à quatre mains. Quant aux « Sites auriculaires », cette pièce de jeunesse pour deux piano –totalement accessoire– est fortement inspirée par Satie, jusque dans son titre…
Il y a donc de fort belles choses, dans cette playlist, et d’autres nettement plus anecdotiques ! Mais, très généralement, l’ensemble s’écoute avec beaucoup de plaisir. Pianiste virtuose raté, Ravel n’en composa pas moins des pièces très virtuoses, descendant moins de Chopin que de Liszt, mais avec un caractère moins ostentatoire que ce dernier : l’écoute en est donc plus apaisante !

Playlist « Retrouvailles d’anciennes connaissances »

C’est une playlist « fond de discothèque » que j’ai concoctée ce jour, à savoir : une playlist constituée d’albums qui font parie des tout premiers CD que j’ai achetés, à partir de 1984, afin de reconstituer petit à petit la maigre collection -dans le domaine de la musique classique- que j’avais commencé à me constituer en LP. –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

On retrouve donc des compositeurs et des oeuvres archi-connus, qui à la sortie de l’enfance ou à l’entrée de l’adolescence, me plaisaient énormément : le deuxième concerto pour piano de Rachmaninoff –sommet du mauvais goût pour certains « mélomanes avancés »-, le concerto pour violon de Tchaïkovsky et le quatrième concerto pour piano de Beethoven, que j’ai aimé dès la première écoute et qui reste pour moi le plus beau de tout le répertoire du genre.
A titre d’anecdote, le coffret de 18 LP duquel il faisait partie était à l’époque l’une des meilleures affaires à faire, en un temps où le disque restait un produit de luxe en France –TVA appliquée à l’époque : 33%, et ce n’est pas une blague…– : les disques consacrés aux 32 sonates pour piano étaient offerts l’intégrale des concertos !

Playlist poétique

La playlist de ce jour est relativement courte mais hautement poétique avec cette ravissante version des « Romances sans paroles » de Mendelssohn par un illustre inconnu –pour moi en tout cas-, Daniel Adni, qui en propose une version très au-dessus de celle de Barenboim, sans doute la plus connue de toutes -et, peut-être, la moins réussie et pas très bien enregistrée de surcroît, mais qui fut longtemps la seule très facilement disponible sur le marché-… –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.
Dans le cas présent, les paroles ne manquent pas, et très généralement, il s’agit de pièces apaisantes et, techniquement, plus virtuoses qu’il n’y paraît –Mendelssohn était un pianiste et un chef d’orchestre virtuose en plus d’avoir été un compositeur génial et un peintre de talent…-.

Cet album fait partie d’un coffret que j’ai longuement hésité à acquérir, l’ayant placé en balance avec le coffret paru chez Hänssler, a priori presqu’aussi alléchant et plus complet, mais ayant déjà les symphonies par FAY, j’ai finalement opté pour le coffret Warner.
La ligne éditoriale de ce coffret est nettement plus jolie et pratique –cliquer sur l’imagette de droite pour la voir en plus grand-, avec de vraies pochettes cartonnées très joliment illustrées, généralement de grands noms d’artistes et un court livret trilingue, ainsi que le catalogue des oeuvres enregistrées : comme je n’en connais pas une grande partie –certaines oeuvres pour piano, de musique de chambre ou de pièces pour orgue-, cela me laisse une large place pour la découverte !

Hécatombe printanière chez les pianistes

Coup sur coup, le mois de mars, cette année, a vu la disparition de deux remarquables pianistes –cliquer sur l’image pour la voir en plus grand– :
• Byron JANIS (1928-2024), pianiste virtuose américain, surnommé le « Horowitz américain » à ses débuts –il fut en effet élève de celui-ci dans son adolescence-, gendre de Gary Cooper, au répertoire assez restreint et à la carrière de météorite, faute de santé essentiellement. Ses « Tableaux d’une exposition » de Moussorgsky, enregistrés en 1961, restent légendaires.

• Maurizio POLLINI (1942-2024), italien, à l’immense répertoire – de Mozart à Varèse, en passant par Beethoven, Chopin et tous les romantiques et Bartok-. Superbe technicien du clavier, auquel, curieusement, je n’ai jamais beaucoup accroché –je n’accroche pas plus à son « maître », Arturo Benedetti-Michelangeli, je les trouve aussi techniquement impeccable que glacial l’un que l’autre– ! Du coup, malgré une très abondante production, je n’ai que très peu de ses disques sur mes étagères, et je les écoute rarement.

Playlist du très original au remarquablement commun !

La playlist du jour est remarquablement contrastée, puisqu’elle est constituée d’un album consacré à la niche de la niche -le disque a dû se vendre à moins de 100 exemplaires sans doute…- d’une part, au quatrième album le plus vendu de l’histoire du disque en France, d’autre part ! –Cliquer sur l’image pour la voir en plus grand-.

Les six concertos pour piano de Handel sont en fait des transcriptions pour piano du deuxième cahier des concertos pour orgue du compositeur, lequel cahier –catalogué en tant qu’opus 7– fut compilé et publié après sa mort. Si la version pour orgue est assez bien répandue et a été l’objet de nombreuses parutions de qualité, cette transcription pour piano est tout-à-fait rare et néanmoins intéressante –et pertinente dans une certaine mesure, les oeuvres étant écrite pour un orgue anglais, de taille réduite et sans pédalier-.
Pianiste et orchestre inscrivent à fond leur interprétation dans un « grand style » parfois anachronique, mais assumé. Evidemment, il s’agit-là d’un aimable et très estimable objet de curiosité, pour les plus curieux des mélomanes, donc…
Le label CPO, qui est une émanation du très grand distributeur allemand JPC, est coutumier de ces productions de raretés –le plus souvent de très grande qualité et dans d’excellentes conditions techniques-, dont on peut penser, pour certaines productions, qu’ils distribuent plus de disques à la presse spécialisée qu’ils n’en vendent aux mélomanes curieux ! La niche de la niche, donc !

Je ne sais pas s’il faut présenter plus longuement « Breakfast In America » de Supertramp, album paru en 1979, dont sont tirés de nombreux succès qui inondèrent les radios cette année-là, et la suivante. Le succès fut international, avec plus de 20 millions d’albums vendus à travers le monde et à ce jour, dont plus de 3 millions en France.
La version CD remastérisée en 2010 est infiniment supérieure à la première édition CD ou qu’à l’actuelle production vinyle en Picture Disc –très joli mais peu qualitatif soniquement-.

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